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Grès au nord de Grosbliederstroff : 3. Description

Vers l'affleurement 1

Prendre le sentier parallèle à la route (Unterer Weg). Au bas d'une descente en lacets, il passe en balcon avec vue plongeante sur la route et la Sarre. Malgré la barrière, prudence ! ...

 

Arrêt 1 :

La paroi montre des bancs de grès "rouge brique" à patine sombre et stratification oblique. Le grain est grossier, des passées conglomératiques sont visibles (galets inférieurs à 3 cm). Des lits de grès plus fins et plus tendres peuvent s'intercaler par endroits. Cet affleurement correspond à la Zone rocheuse des Grès de Karlstal (Karlstalfelszone : Kfz) qui sépare les Couches de Karlstal inférieures (Untere Karlstalschichten : Uks) partiellement visibles en bord de route, des Couches de Karlstal supérieures (Obere Karlstalschichten : Oks) visibles à l'arrêt suivant. La série de Karlstal est l'équivalent local du sommet du Grès vosgien, elle présente en son sein un épisode correspondant à des dépôts fluviatiles (remplissage de chenaux) sous climat aride. Selon W. Dachroth (1985), la base de la Kfz montre un caractère ravinant et constituerait une discordance sédimentaire régionale : discordance de la Sarre.

 

Vers l'affleurement 2

Le sentier serpente à l'horizontale dans un versant raide recoupé par des ravins (passages possibles de failles) puis débouche sur un espace plus ouvert et moins pentu. A main gauche, se dresse une paroi de grès bigarrés.

 

 

Arrêt 2 :

A. La partie inférieure de la paroi est constituée de grès disposés en lamines minces (Dünnschichten) souvent horizontales, parfois obliques. Le matériel est un sable tantôt fin et clair, tantôt silteux et plus coloré, mais peu cimenté dans l'ensemble. Les grains de quartz sont de forme arrondie. Des figures sédimentaires sont visibles à plusieurs endroits : rides, feuillets inclinés, micro-chenaux... Cet ensemble appartient aux Couches de Karlstal supérieures. Elles correspondent à des dépôts de plaine inondable et résultent du débordement de chenaux. Les particules sableuses décantent dans une nappe d'eau temporaire et le sédiment subit très tôt l'action du vent : soit sous une faible tranche d'eau par l'effet des vagues, soit à l'air libre par des effets d'érosion éolienne (déflation) et de dépôt (dunes).

 

La photographie montre un détail de la sédimentation des Oks (couverture algaire partielle) : une unité décolorée à stratification oblique est intercalée entre des lamines horizontales. Le sommet présente une suite de rides. Exemple possible de l'interpénétration entre régimes de dépôts fluviatiles et éoliens.

 

 

B. La partie supérieure de la paroi présente une coloration brune à violacée. Elle est faite d'un grès grossier à conglomératique contenant des galets de quartz et des nodules sombres de nature carbonatée dont l'altération aboutit à la formation de cavités noires (oxydes de fer et de manganèse). La stratification est oblique à entrecroisée et la base de cette série érode les couches de Karlstal. Cette discordance sédimentaire (visible également le long de la route de Grosbliederstroff : annexe I) est par ailleurs présente dans l'ensemble du bassin germanique et désignée sous le nom de "Discontinuité de Hardegsen ". Elle annonce une évolution dans le régime sédimentaire. La réactivation de l'érosion dans le bassin versant fournit des matériaux bien moins usés qu'auparavant, contenant du quartz, du feldspath, mais aussi du mica : sédiments immatures. Les Couches intermédiaires qui suivent, déposées dans un contexte de chenaux plus ou moins divagants sont à la base d'un nouveau cycle sédimentaire.

 

Tectonique au niveau de l'arrêt 2

Les lamines de sable, quasi-horizontales au moment du dépôt, présentent actuellement un pendage de quelques degrés vers le sud-est : flanc nord du "synclinal de Sarreguemines". Par ailleurs, le site permet l'observation de deux failles : F3 et F4. L'affleurement étudié correspond à l'escarpement de la faille F4, il est situé sur le flanc nord d'un horst étroit qui est lui-mëme le prolongement d'un compartiment plus développé sur la rive droite de la Sarre (Güdingen). Des circulations d'eau le long de la faille F4 ont pu être à l'origine des décolorations observées sur la paroi.

Dans le secteur qui précède l'arrêt 2, le sentier franchit une entaille correspondant au passage de la faille F3. Elle n'est bien visible qu'au prix d'une petite escalade (non conseillée) et présente à cet endroit-là un miroir à stries obliques (photo). A cette hauteur (carré blanc sur la carte), F3 met en contact un compartiment sud appartenant déjà aux Couches intermédiaires (conglomérat surmontant la première zone violette) avec les grès des Couches de Karlstal supérieures (lèvre nord). Le rejet vertical dépasse 10 mètres.

 

 

Vers l'affleurement 3

 

Par un lacet assez ample, le sentier remonte le compartiment au nord de F4, affaissé de plusieurs dizaines de mètres (les formations appartenant aux Couches intermédiaires visibles sur la photo précédente se retrouvent au niveau de la route !). Au niveau d'un carrefour, prendre le sentier moyen (mittlerer Weg) qui part à l'horizontale. Dans le premier virage à droite, un bloc de grès basculé présente à sa base un niveau silteux marron comportant des taches claires. Selon certains auteurs, il pourrait s'agir de zones de réduction du fer sur le passage de racines non fossilisées. D'autres caractéristiques visibles par la suite montrent également une évolution vers un paléoclimat moins aride. Peu après cet endroit, on pénètre dans un secteur haché de failles où affleurent les Couches intermédiaires.

 

 

 

Tectonique à l'arrêt 3

La faille la plus spectaculaire (F1) présente un couloir large d'environ un mètre et le rejet de l'ordre de cinq mètres est facilement mesurable grâce à des horizons-repères (conglomérat et toit de la zone violette1). Elle est relayée par une deuxième faille (F2) dont le rejet plus important amène les formations visibles ici, à l'altitude de l'affleurement 2 (photo du miroir de F3).

 

A l' arrêt n°3, les Couches intermédiaires présentent un faciès particulier qui se manifeste par un niveau rocheux moins résistant qu'emprunte le sentier. Il s'agit d'une des zones violettes présentes au sein de la formation. Le matériel gréseux dont on devine encore la stratification par endroits, prend un aspect grumeleux en même temps que la couleur devient lie de vin. La roche renferme de nombreux cylindres verticaux de nature dolomitique, parfois des niveaux stratiformes. Ils peuvent être silicifiés secondairement. Cette formation est interprétée comme étant un complexe de paléosols formés en milieu temporairement marécageux. Les cylindres correspondraient à des manchons formés sur le passage de racines. Des lits de nodules dolomitiques proviendraient du remaniement de ces croûtes avec transport sur de faibles distances. La zone violette peut être suivie sur plusieurs dizaines de mètres, au cours desquels son épaisseur évolue. Elle est surmontée d'une corniche de grès violacés comportant un banc conglomératique d'un demi mètre qui contient des produits de démantèlement de paléosols. L'ensemble de ces bancs très étendus correspond à des dépôts de chenaux simples (barres transversales) .

Vers l'affleurement 4

Il s'agit de gagner le sentier supérieur (oberer Weg) par l'embranchement à l'extrémité sud du sentier du milieu. Un contexte analogue en certains points à l'arrêt précédent s'offre au visiteur.

 

La photo prise en hiver montre une deuxième zone violette surmontée par sa corniche garnie ici de stalactites de glace. A cause de la compaction du matériel sableux liée à la présence du ciment carbonaté, les zones violettes constituent des niveaux imperméables où se situent un certain nombre de suintements et de sources.

Vers l'affleurement 5

Depuis l'arrêt 4, il faut à présent rejoindre le petit ravin à proximité de l'Hôpital du Sonnenberg (partie sud des Felsenwege) en empruntant les sentiers à mi-pente. Au-dessus de la cascade, on pourra remonter le lit du ruisseau et observer les Couches intermédiaires supérieures.

Les bancs de grès deviennent progressivement plus épais, le grain plus fin et la couleur tire sur le beige. Des lentilles argileuses s'intercalent entre les grès. Au niveau du chemin forestier supérieur, des fossiles végétaux (Equisetites) ont pu être observés à la suite de travaux. Le contexte paléogéographique a encore évolué et s'achemine à présent vers un système de chenaux sinueux annonçant le milieu qui va présider à la formation du Grès à Voltzia..

Retour au parking

Par le sentier à mi-hauteur revenir sur ses pas et regagner le parking en passant au pied de deux cascades... Deux possibilités de prolongement de cette visite se présentent dans un rayon de 4 km au sud. Elles sont détaillées dans l'annexe 1.

 

 

Remerciements

L'auteur tient à remercier M. Marc Durand pour sa participation à une sortie sur le terrain et Mme Sylvie Bourquin pour ses remarques constructives.


Auteur : Etienne FEUCHTER - Date de création : 18/04/2009

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Contact : Roger CHALOT (Géologie) - Christophe MARCINIAK (Réalisation)