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Argiles du Gault (Revigny) : 3. Description

Géologie

L'ancienne marnière de Revigny permet d'observer, sur une épaisseur de 25 mètres environ, la formation des Argiles du Gault qui forment le substratum imperméable d'un étang et les talus qui constituent les berges. Il s'agit d'argiles tégulines, c'est-à-dire exploitées pour la production de tuiles.

La végétation, qui a repris ses droits depuis l'abandon de l'exploitation, au début des années 70, efface peu à peu les affleurements au cours du temps. Cependant, les argiles apparaissent encore sporadiquement au niveau de pans verticaux au sommet des anciens fronts de taille. Celui situé à l'ouest (fig.3) est le mieux préservé et offre une belle surface d'affleurement (100 mètres de long pour 5 mètres de hauteur environ à son sommet). A l'est, les argiles apparaissent sur des surfaces plus limitées et disséminées. En période sèche, la berge sud du plan d'eau permet d'observer la base de la formation.


Fig.3: Le sommet du front de taille ouest

A l'affleurement, les Argiles du Gault apparaissent sous forme d'une argilite homogène de couleur grise (fig.4). L'analyse chimique révèle un taux de carbonate de calcium n'excédant pas 15% (Allouc et al. 2007)

Fig.4: Les argiles à l'affleurement sur la berge sud du plan d'eau

Les fossiles sont abondants, ce qui faisait de la carrière un lieu prisé des collectionneurs. Les fossiles se trouvent aisément en surface de la roche, dégagés par la pluie et le ruissellement. Ils sont souvent pyritisés ou à l'état de moules internes ; plus rarement les coquilles carbonatées sont préservées. La faune, très diversifiée, a fait l'objet d'analyses et d'inventaires détaillés (Fauvel et al. 1978) ; les macrofossiles (fig.5) sont d'origine marine et comprennent ammonites (Hoplitidés et formes hétéromorphes), bivalves divers (genres Arca, Plicatula, Nucula, etc.) et inocérames (Inoceramus concentricus), gastéropodes, scaphopodes, serpules, crustacés, éponges et polypiers. Les vertébrés sont également présents: dents et ossements de poissons (requins notamment), d'ichtyosaures et de crocodiliens. La flore est représentée par des fragments de bois de conifères (cèdre).


Fig.5: Quelques fossiles récoltés en surface des argiles

Les ammonites, dont la répartition varie entre le bas et le haut de la carrière, permettent d'attribuer un âge Albien moyen (fin du Crétacé inférieur) aux Argiles du Gault de la carrière. Cette datation est confirmée par les données de la microfaune de foraminifères.

Les Argiles du Gault (fig.6) correspondent à une formation dont l'épaisseur totale varie de 60 mètres à 110 mètres, s'amincissant d'ouest en est. L'âge de cette formation s'étale de l'Albien moyen à l'Albien supérieur (Buvignier 1852 ; Owen 1971 ; Amédro 1984). Le milieu de sédimentation correspond à celui d'une mer ouverte, bien oxygénée, vraisemblablement situé à une profondeur au-dessous de la limite d'action des vagues (Allouc et al. 2007). Cette formation surmonte les dépôts des Sables verts inférieurs à nodules phosphatés de l'Albien inférieur dans lesquels on trouve également des restes de dinosaures terrestres dans la région de Varennes-en-Argonne plus au nord (Le Roux et al. 2006). Les dépôts de l'Albien terminal des Marnes de Brienne ou, plus au nord, de la Gaize argonnaise (cf. fiche de Passavant-en-Argonne) succèdent aux Argiles du Gault.



Fig.6: Position stratigraphique des terrains affleurant dans la carrière de Revigny
(colonne lithostratigraphique d'après Allouc et al. 2007)

L'Albien et la fin du Crétacé inférieur correspondent à une période où la mer qui avait quitté la région au moment du passage Jurassique-Crétacé revient envahir le centre du Bassin Parisien en progressant depuis le sud-est (océan Alpin ou Mésogée) vers le nord-ouest, rejoignant ainsi la Mer du Nord. La Lorraine occidentale est recouverte par la partie orientale de cette mer épicontinentale séparant le domaine continental nord-atlantique (qui comprend le Massif Central et le Massif Armoricain) à l'ouest et le bloc Ardenne-Hunsrück au nord-est (Le Roux et al. 2006).

La tuilerie Clavey

La marnière de Revigny alimentait une briqueterie jusqu'en 1924, année de sa fermeture. Edmond Clavey, fondateur de la tuilerie éponyme de Foussemagne (Territoire de Belfort) racheta l'ensemble en 1926 pour accroître la production de tuiles en terre cuite, afin de satisfaire un marché florissant (plusieurs dizaines de milliers de tuiles fabriquées et exportées chaque jour). L'âge d'or des tuileries Clavey se situe dans les années 30 : celles-ci approvisionnent alors le bordelais, la région parisienne, le nord, l'ouest et, bien entendu, l'est de la France.

La tuile plate "clavey" (désormais fabriquée en aggloméré) reste encore aujourd'hui largement utilisée (fig.7).

Fig.7: Tuile "clavey"

La Seconde Guerre Mondiale et l'avènement du béton vont porter un coup d'arrêt au marché de la tuile en terre cuite produites par les usines Clavey. L'entreprise familiale est rachetée et devient la Société Debreuil en 1963 puis B.H.T.P. (Briques Hourdis Tuiles et Préfabriqués) en 1964. C'est sous ce dernier nom que la carrière est le plus souvent mentionnée dans la littérature. L'entreprise B.H.T.P. cesse son activité en 1971 (http://www.foussemagne.com/tuileries-clavey.htm).

Des bâtiments de l'ancienne tuilerie ne subsistent que trois hangars, en ruines pour deux d'entre eux (fig.8). Le troisième est occupé par l'atelier d'un garagiste.



Fig.8: Un des trois bâtiments qui subsiste de l'ancienne tuilerie Clavey à Revigny


Bibliographie et sites internet

http://www.foussemagne.com - site de la mairie de Foussemagne (90) proposant un historique des tuileries Clavey.


AMÉDRO F. (1984) – Nouvelles données paléontologiques (ammonites) surl'Albien de la bordure nord-est du bassin de Paris (de la Thiérache au Perthois). Bull. Soc. Normandie et Muséum du Havre, LXXI, 2 -3, p. 17-30.

BUVIGNIER A. (1852) – Statistique géologique, minéralogique, métallurgique, et paléontologique du département de la Meuse, Baillère édit., Paris, 694 p. + atlas.

D.D.E. de la Meuse (2001) - Schéma départemental des Carrières de la Meuse - 2. Rapport - 68 p.

FAUVEL P.-J., GUÉRIN-FRANIATTE S., MAGNIEZ-JANNIN F. (1978) – Nouvelles données paléontologiques sur l'« Albien supérieur » de Revigny (Meuse). C.R. Congr. Soc. Savantes, Nancy, fasc. IV, p. 323-334.

HILLY J., HAGUENAUER B. (1979) – Guides géologiques régionaux. Lorraine–Champagne. Masson, Paris, 216 p.

LE ROUX J., PAUTROT C. et BUFFETEAU E. (2006) - La régression tithonienne, Cénomanien, Gaize de l'Argonne. in LEXA-CHOMARD A. et PAUTROT C. "Géologie et géographie de la Lorraine". Serpenoise éd. p.126-133.

OWEN H.G. (1971) – Middle Albian stratigraphy in the Anglo-Paris Basin. Bull. Brit. Museum (Nat. Hist.,) Geol. Suppl., 8, London, 164 p.

Auteur : Didier ZANY - Date de création : 08/08/2009

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Contact : Roger CHALOT (Géologie) - Christophe MARCINIAK (Réalisation)