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Houiller de Sarrebruck : 5. Annexe I

Dans cette partie sont présentés quelques compléments aux descriptions précédentes. Ils sont largement inspirés des travaux de recherche des géologues allemands.

Stratigraphie

Echelle stratigraphique simplifiée. A gauche, figurent les subdivisions classiques. A droite, figurent les unités tectono-sédimentaires pour le bassin considéré comme un rift. (certains auteurs incluent le Westphalien dans le stade syn-rift).

Cadre sédimentaire et paléogéographique

Le westphalien supérieur des assises de Sarrebruck.

Le Westphalien supérieur des Assises de Sarrebruck  comporte des conglomérats, des grès, des pélites et des veines de houille. Au total, l'épaisseur est comprise entre 3,5 km au sud-ouest  et 2,5 km au nord-est. S'y intercalent des niveaux de tuffites ou cendres volcaniques,  désignées sous le nom de (Kohlen)Tonstein. Leur provenance est extérieure au bassin. Ces niveaux constituent des repères chronostratigraphiques très utiles (méthode K/Ar). Le contexte est celui d'une plaine deltaïque ménageant des étendues marécageuses entre les chenaux.  Les apports sédimentaires se font essentiellement depuis le bloc rhéno-hercynien dans la partie septentrionale (Schäfer) au Westphalien. Des rivières méandriformes abandonnent des bancs de sables fins qui correspondent à la lente migration latérale des chenaux. Dans les marécages situés entre les chenaux, se développe la forêt houillère à l'origine d'une accumulation  de matière végétale. Cet étage appartient au stade qualifié de proto-rift. Il correspond à une sédimentation qui se réalise dans un bassin relativement étendu généré par un système de failles à activité mineure (Gabrielsen, Nottwedt). 

Le Conglomérat de Holz.

Cette formation atteint une épaisseur d'une cinquantaine de mètres dans la localité de Holz et présente une grande extension en Sarre et en Lorraine. Elle est connue dans le monde minier pour sa grande dureté (silicification). Le conglomérat de Holz repose en discordance (angle de 15°) sur les formations du Westphalien terminal. Une phase d'érosion importante surtout marquée dans la partie nord du bassin, a introduit une lacune de 1500 mètres de dépots correspondant à un vide d'environ 2 à 3 MA. (lacune du sommet du Westphalien D et du Cantabrien, premier étage du Stéphanien). Le conglomérat de Holz comprend du sommet vers la base :

8 à 10 mètres de conglomérats rouges (diamètre maximal des blocs : 30 cm)

20 à 25 mètres de grès avec des intercalations gréso-argileuses rouges

10 mètres de conglomérats gris (diamètre maximal des blocs : 90 cm)

Les galets ont en moyenne 10 cm, ils sont relativement bien usés, majoritairement formés de quartzites (Klinghammer, Konzan). L'origine reste discutée : selon Engel (1988), il s'agit d'un dépot réalisé dans un système de chenaux en tresses, suite à un épisode tectonique de grande ampleur. Selon Weingardt (1975), des événements climatiques à caractère catastrophique seraient également responsables  de ce dépot.

Le Stéphanien (affleurant dans la partie ouest, au-dessus du conglomérat de Holz, non visité)

Le Stéphanien est caractérisée par  la formation de  sous-bassins séparés par des failles transverses actives (stade syn-rift). La subsidence différente est à l'origine de variations de faciès et d'épaisseurs. Les roches sont les mêmes qu'auparavant, mais la coloration rose est présente ainsi que le mica alors que les veines de charbon deviennent plus rares. A cette période, les apports se font en majorité depuis le sud et le centre de subsidence maximale migre progressivement vers le nord-est, le long de la faille de Metz-Hunsrück. Les aires de sédimentation correspondent aux diverses parties d'un delta et deviendront parfois lacustres.

 

Le milieu au Carbonifère supérieur

Durant le Westphalien, le bassin houiller considéré comme un bassin d'altitude ( 2000m selon certains auteurs) est situé dans la zone intertropicale (selon les données du paléomagnétisme), au nord de l'équateur. Il va dériver progressivement sans subir d'évolution climatique majeure pendant la période considérée ici : Westphalien supérieur- début du Stéphanien.

La flore bien représentée montre quelques modifications lors du passage Westphalien-Stéphanien. Dans la strate arborescente, les Lycopsidées (Lepidodendron, Sigillaire) très répandues au Westphalien vont céder la place aux Calamites et fougères géantes, les Ptéridospermées seront moins diversifiées. Ces modifications refléteraient des changements introduits par le régime tectonique.  Les restes de faune  qui comportent des formes terrestres et aquatiques ( invertébrés dont le mille-pattes géant Arthropleura armata, poissons, traces de batraciens et reptiles), sont plutôt rares au Westphalien et vont devenir plus abondants avec les formations lacustres du Stephanien.

-Thomas Schindler, Ulrich H.J.Heitdke & Coll.(2007); Kohlesümpfe, Seen und Halbwüsten. Pollichia Sonderveröffentlichung Nr.10

-A noter : les collections de fossiles du houiller sarrois se trouvent au ZfB Zentrum für Biodokumentation Landsweiler-Reden (Schiffweiler)
Ausstellung  „Geologie der Region“ in Landsweiler-Reden

 Evolution permienne

Si le régime fluvio-lacustre persiste à l’Autunien basal dans des bassins souvent séparés, la tendance fluviatile va s’accentuer par la suite. Parallèlement, l’activité tectonique va s’intensifier et un important volcanisme s’installera. Au Saxonien, des conditions climatiques plus contrastées se traduisent par des environnements de playas alimentées par des cours d’eau temporaires.

Evolution post permienne du Bassin houiller.

On pourra se reporter à la fiche " Côte de Lorraine" de ce site, en particulier à la rubrique : Evolution historique. La coupeci-dessous illustre les difficultés d'exploitation du charbon liées à la tectonique post-sédimentaire.

La carbonification.

Les études menées sur différents composants minéraux (indices de réflexion de la vitrinite, fission sur apatite, argilites...) ont montré que la carbonification est un phénomène précoce dans le bassin houiller sarro-lorrain. Elle est réalisée en cours de sédimentation à un degré d'autant plus important que la subsidence est élevée. Par ailleurs, ces travaux (Hertle, Henk) montrent qu'une importante partie de la série sédimentaire a été érodée ( entre 1700 et 3200 m) à la fin du permien. Une deuxième phase d'échauffement s'est produite à l'issue de la sédimentation secondaire (épaisseur de recouvrement sédimentaire : 1600 m), sans produire d'effet supplémentaire. Les intrusions volcaniques permiennes n'ont eu qu'une répercussion localisée (cokéfaction dans certaines veines).

- Hertle Michael (2004)-Numerische Simulation der geologischen Entwicklungsgeschichte des permokarbonen Saar-Nahe-Beckens.Doctoral Dissertation. Rheinisch-Westfälische Technische Hochschule Aachen.

Cadre tectonique

Le "Saar Nahe Becken" se prolonge sous la couverture secondaire par le bassin houiller de Lorraine pour former le bassin houiller sarro-lorrain. Cette structure orientée sud-ouest nord-est couvre une superficie de 300 sur 100 km, dont seule une surface de 100 sur 40 km est à l'affleurement entre la frontière et le fossé rhénan. Limité au nord par la faille du Hunsruck qui se prolonge par celle de Metz-Gorze, le bassin sarro-lorrain atteint la Marne au contact de l'accident du Pays de Bray -Vittel. Les limites Sud et est Est sont moins bien marquées sur le plan tectonique.

Le bassin houiller offre une structure en demi-graben affectée par une double série d'accidents :

-  les uns sont parallèles à l'axe et se traduisent par des failles, des "synclinaux" et "anticlinaux" dont le plus remarquable est celui de Sarre- Lorraine ( anticlinal de Merlebach, de Sarrebruck, du Palatinat).

- les autres sont transversaux et soulignent un découpage en blocs. Ces derniers ont eu des comportements différents  donnant naissance à des sous-bassins et des seuils qui ont marqué les dépots. Les variations brusques de faciès et les structures sédimentaires observables à proximité des failles suggèrent une subsidence opérée par à-coups (Stollhofen). 

Le bassin houiller sarro-lorrain a donné lieu à plusieurs modèles de mise en place fondés sur les données des puits et forages et sur les profils sismiques (Dekorp).

- les premiers modèles développés par Donsimoni puis par Henk attribuent la formation du bassin à un effondrement post collisionnel de l'édifice hercynien. Au Westphalien, une extension se produit au contact de la zone de suture entre la zone saxothuringienne chevauchante et la zone rhéno-hercynienne sous-charriée depuis le nord. La faille du Hunsruck comporte deux accidents (profil Dekorp), l'un subvertical, l'autre incliné à proximité de la croûte inférieure faisant office de surface de décollement (detachement). Les reliefs nés de l'exhumation partielle du bloc nord sont à l'origine des apports massifs de sédiments dans le bassin. A partir du Stephanien se produit une reorientation du champ des contraintes. La partie sud subit une remontée. L'extension ouest-est dirigée de manière oblique par rapport à l'axe du bassin est relayée par des failles de décrochement : le bassin est découpé en sous-unités, en seuils et creux.

- Donsimoni, M., 1981. Le bassin houiller lorrain. Éditions du B.R.G.M.. vol. 117. Mémoires du BRGM. 102 p. ISBN : 978-2-7159-5021-4. 15 pls.

- Andreas Henk (1993)- Subsidenz und tektonik des Saar-Nahe-Beckens. Springer-Verlag

- le second modèle développé par Schäfer et Korsch envisage la formation du bassin houiller sous l'angle d'un bassin en pull-apart (strike-slip basin) et accorde le premier rôle à la faille de décrochement de Metz-Hunsrück. La migration des centres de dépot maximal au cours du temps est caractéristique de ce style de structure. Un mouvement général de décrochement dextre s'opère le long de la faille du Hunsruck. Le coulissage du bassin vers le sud-ouest et son enfoncement sont responsables de l'accumulation de près de 10 km de sédiments, dont il ne reste que 8 km actuellement. Au permien final, un épisode de convergence serait responsable de la formation des structures plissées ( en particulier le déversement vers le sud de l'anticlinal de Sarrebruck).

-  Schäfer, Andreas (2011).Tectonics and sedimentation in the continental strike-slip Saar-Nahe Basin (Carboniferous-Permian, West Germany) In Deutsche Gesellschaft für Geowissenschaften: Zeitschrift. 

- le modèle récent d’un Collectif nancéen envisage la formation du bassin dans un cadre beaucoup plus vaste. Le bassin sarro-lorrain correspond à un bassin de type pull-apart de forme rhomboédrique, asymétrique, reposant sur la surface de décollement créée par le passage de la branche incurvée de la faille Metz-Hunsrück. Il se situe entre deux zones de cisaillement qui sont la faille Nord-Artois /Wittlich (au nord) et la faille de Bray-Vittel (au sud). L’activité continue de ces deux décrochements majeurs exerce sur le bloc central des conditions sectorielles où se succèdent extension, rotation, compression et magmatisme qui s’accordent avec l’histoire sédimentaire du bassin

-V. Pryvalov, J. Pironon, A. Izart, R. Michels, O. Panova, 2015. A NEW TECTONIC MODEL FOR THE LATE PALEOZOIC EVOLUTION OF THE LORRAINE- SAAR COAL-BEARING BASIN (FRANCE/GERMANY). Researchgate.net/publication/305731067

 

 

 

 


Auteur : Etienne FEUCHTER - Date de création : 24/11/2011 - Dernière modification : 25/05/2022

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