L'inversac de la Deuille de Crézilles (54) est un entonnoir karstique ouvert dans les calcaires oolithiques du Bajocien supérieur (fig.2).

Fig.2 : Formations encaissantes de l'inversac de la Deuille de Crézilles (données chiffrées = âges en millions d'années - © BRGM).

Il fonctionne soit comme une perte, soit comme une résurgence (fig.3) comme celui du Trou des Glanes voisin (Voir la fiche "Inversac du Trou Des Glanes" Moutrot 54).

Fig. 3 : Trois photographies de l'inversac de la Deuille de Crézilles prises à quelques jours d'intervalle : le 31 oct. 2012 (les deux clichés du haut - fonctionnement en perte) et le 4 nov. 2012 (cliché du bas - fonctionnement en résurgence)

Il fonctionne en perte après des pluies modérées, lorsque le petit ruisseau temporaire dit "de la Deuille de Crézilles" qui draine le vallon s'engouffre dans la doline. L'érosion causée par ce type de fonctionnement est bien visible au bas de la première photo (fig. 3).

Lors de son fonctionnement en résurgence (fig. 3 et 5), la doline se remplit et déborde ; l'eau s'évacue alors par le lit aérien du ruisseau de la Deuille de Crézilles qui est un affluent en rive droite de La Bouvade (fig. 4).

Fig. 4 : Deux photographies du ruisseau sortant de l'inversac de la Deuille de Crézilles, à sec le 31 octobre 2012 (cliché du haut) et en eau le 4 novembre 2012 (cliché du bas)

La doline fonctionne alors comme un puits artésien naturel qui évacuerait le trop plein du karst sous-jacent mis en pression (fig. 3 et 5). Des colorations (1) ont montré que l'eau qui s'échappe de la Deuille de Crézilles en résurgence provient des pertes de l'Aroffe à Gémonville 54 (Voir la fiche Pertes de l'Aroffe) distantes de plus de 15 km (1)(2)(3). 

Fig. 5:  Fonctionnement en résurgence de l'inversac de la Deuille de Crézilles (novembre 2012)

Ce système karstique complexe (fig. 6) (1)(2)(3) est connu depuis plusieurs siècles (4) (5).

Fig. 6 : Localisation des pertes (M = Moche, HM = Haut du Moche, FSol = Fontaine des Soldats, FSou = Fond De la Souche) et principales résurgences de l'Aroffe

La tentative de plongée de la Deuille de Crézilles par des spéléologues-plongeurs (6) dans le siphon en eau claire au niveau de l'émergence temporaire à la base d'un petit ressaut a échoué. Le site ayant ensuite été rebouché par l'ONF, les tentatives de plongées après une éventuelle désobstruction n'ont pu se poursuivre.

La fiche "Tertres d'Autreville" (88) et celle à venir "Paléokarst sous alluvial" à Pierre La Treiche (54) décrivent aussi des phénomènes hydrogéologiques associés au même réseau karstique.

La fiche "Domèvre sur Durbion" (88) décrit un phénomène identique mais plus modeste de perte et résurgence avec un puits intermédiaire servant d'exutoire de trop plein.

Bibliographie:

(1) J. LE ROUX et J. SALADO (1980) Fonctionnement des aquifères calcaires lorrains déduits des expériences de traçages colorimétriques, Service Régional Aménagement Eaux de Lorraine, 177 pages.

(2) A. WEHRLI (1996) Les modalités de la circulation de l'eau dans le bassin-versant topographique et hydrogéologique de l'Aroffe, Mémoire de DEA, Université de Metz, Département de Géographie, 178 pages.

(3) P. GAMEZ, F. LETOUZE et M. SARY (1985) Le bassin karstique de l'Aroffe, SPELUNCA Mem., n°14, pages 78 à 79.

(4) A. KIENTZ (2010) Les deuilles en Pays de Colombey. Etudes Touloises n° 135, article 2.

Les Etudes Touloises sont une revue trimestrielle du Cercle d’Etudes Locales duToulois

(5) J. OBELLIANNE (1963) La commune de Gémonville et le problème des eaux de l'Aroffe, Bulletin de l'Académie Lorraine Des Sciences, Tome 3, n° 2 Novenbre 1963.

(6) D. JACQUEMIN (1997) Info Plongée, Inventaire des siphons de Lorraine et de Champagne-Ardennes, Bulletin de la Comission Plongées de La fédération française ed Spéléologie, n° 75, Février 1997, page 8.