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Buntsandstein du secteur de Lichtenberg : 3. Description

Sommaire :
 
1. Le château de Lichtenberg
2. La carrière Loegel de Rothbach
3. La dune de Reipertswiller
4. Emplacement des grès de Lichtenberg et des environs au sein du Buntsandstein

 

1. Le château de LICHTENBERG

1.1. La géologie du site du château

Le château de Lichtenberg est installé à 381 mètres, au sommet d'une butte gréseuse qui domine le centre du village d'une quarantaine de mètres. A ses pieds et vers l'ouest, s'étend un plateau occupé en partie par des prairies. Il se prolonge par une échine boisée vers le sud-est. Le rocher central a été entouré par un fossé (Vauban) et comporte une terrasse d'artillerie culminant à 411 mètres.

Histoire du château : voir la page Panorama des châteaux en Alsace - CRDP de l'Académie de Strasbourg

Le site fortifié laisse entrevoir des affleurements rocheux en plusieurs points, notamment au niveau du fossé extérieur (chemin de ronde accessible), et dans la partie haute (rocher central supportant les tours et la terrasse d'artillerie).Ils constituent des faciès caractéristiques du Buntsandstein moyen de ce secteur.

Dans l'ordre du dépôt sédimentaire :
a. Photo n°2. Les parois verticales du fossé creusé dans le roc ont été partiellement préservées de l'érosion par un parement en pierre. Le grès reste cependant visible comme ici à la base du bastion à droite de l'accueil. La stratification est ordonnée en lamines minces horizontales (Dünnschichten). Elle est le résultat de dépôts de plaine alluviale où les apports peuvent résulter de débordements temporaires de chenaux qui s'accompagnent de la décantation des particules. Ils sont parfois l'œuvre du vent (sédimentation éolienne / cf infra).  On pourra noter un phénomène d'alvéolisation récente sur les blocs de maçonnerie dans la partie supérieure du document.    
b. Photo n°1. Partie haute du bastion à droite de l'accueil : la première enceinte du château située au-dessus du fossé est installée sur un niveau gréseux plus résistant formant une corniche visible également dans la montée vers le tunnel. Il est formé de faisceaux entrecroisés de lamines obliques (en cuiller) qui témoignent d'une mise en place sous forme de bancs de sable au sein d'un réseau en tresse. Les chenaux larges et peu profonds divaguent dans la plaine au cours des crues.                                                                                                
c)
Photo n°3. Au cœur de la place-forte, le sommet du rocher central comporte quelques mètres d'un conglomérat à stratification oblique qui traduit un régime de forte énergie. Ce dernier s'observe facilement le long de l'escalier qui donne accès au niveau supérieur.

 

 1.2. Le paysage depuis la plateforme d'artillerie

Accessible par un escalier circulaire en pierre, la plateforme offre une vue à 360°. Une petite tourelle d'observation porte une table d'orientation.

Cliquer

Vue panoramique depuis le sommet. Le secteur couvert est précisé sur la carte du relief ci-dessous (accès à l'agrandissement par clic sur le document) : le château de Lichtenberg situé à quelques kilomètres seulement du rebord oriental des Vosges permet l'observation du paysage façonné par la géologie récente. A l'est et au sud visibles ici, la zone de basse montagne est interrompue de manière brutale par la faille vosgienne. La vue porte sur le champ de fractures de Saverne au relief de collines qui précède la plaine d'Alsace. Au nord et à l'ouest dominent les croupes découpées en trapèzes et en cônes dans la surface monoclinale. Elles sont couvertes de forêts et défrichées dans les zones d'habitat. C'est le domaine des grès vosgiens et le territoire du Parc régional des Vosges du Nord.

 

1.3. La salle d' exposition au château de Lichtenberg

C'est dans l'ancien arsenal qu'a été aménagé un espace d'exposition. Il a hébergé de 2002 à 2013 les "Archives de grès" et de juillet 2014 à novembre 2018, il a présenté au public "Naissance, vie et mort d'une mer" à l'époque du Trias.

 

2. La carrière Loegel de Rothbach

Vue sur l'exploitation depuis le chemin d'accès : le front de taille atteint les dimensions respectables d'environ 250 mètres en largeur et une hauteur qui s'échelonne entre 300 m (sommet) et 246 m (plancher photo). L'extraction actuelle se concentre sur les niveaux gréseux de la base. Au premier plan, à droite, une paroi lisse exploitée selon la découpe du jet Loegel montre la stratification en bancs lenticulaires. Au fond de la tranchée, des haveuses découpent le grès en blocs. Au niveau supérieur marqué par la présence de gros blocs rectangulaires et d'une pelle sur chenilles en action sur un cône de déblais, se situe la zone principale d'extraction des grès de qualité (niveau zéro). Le fond supérieur de la carrière est constitué d'une paroi découpée en paliers de grès de moindre qualité.

Vue sur la zone d'exploitation des grès de grande qualité : le niveau zéro donne accès à un ensemble de bancs lenticulaires très homogènes et jointifs, d'une grande cohésion. L'extraction se fait par galeries et la découpe des blocs par haveuse. Les blocs sont ensuite évacués et transférés aux divers ateliers selon la demande. Au-dessus de la "veine" exploitée, la série révèle des bancs en lames d'aspect lenticulaire et des couches minces rectilignes faites de grès plus tendres et argileux. Cet ensemble où alternent des dépôts de chenaux et de plaine alluviale constitue des morts-terrains (À noter la stratigraphie soulignée par les niveaux aquifères que constitue la base de certains bancs).

Plan de coupe vertical d'un bloc de grès extrait : il arrive que la zone de jonction entre deux bancs successifs présente une surface de contact marquée par des "débris" divers : passées de galets de quartz, ou comme ici, des plaques d'argile brune, des taches brunes à noirâtres (oxydes de fer et de manganèse).
La vue de droite "à plat" en montre l'aspect polyédrique caractéristique d'un dépot de flaque temporaire remanié (taille des galets argileux : de quelques centimètres à un décimètre).

 

3. La dune de Reipertswiller

Vue de l'affleurement : en bordure de chemin, une paroi dégagée sur une dizaine de mètres montre une série où alternent à plusieurs reprises des bancs gréseux à stratification horizontale (Dünnschichten) et des faisceaux obliques. Dans la moitié inférieure, marqué par un trait vertical gris (à droite), se situe sur une hauteur de 1 mètre, un ensemble spectaculaire, partiellement évidé, qui offre une disposition en lamines obliques, arquées et enchevêtrées. La présence de sable et d'un bloc effondré à la base de la paroi rend compte de la solidité toute relative de ce matériau.

Détail de la paroi (partie gauche document précédent / hauteur 1 mètre environ) : lèvre de fissure verticale portant encore des traces noires de croûte altérée. Dans la partie inférieure, le grès affleure sous forme de lamines centimétriques obliques, accusant une pente de l'ordre de 30°, caractéristique. Il est surmonté – au-dessus d'une surface de discordance plane – par un deuxième faisceau de lamines obliques, granoclassées, particulièrement friables (voir les logettes de nidification d'insectes). L'ensemble correspond à une sédimentation éolienne de type barkhanes (dunes plurimétriques). Des sédiments interdunaires coiffent la série, sous forme de strates horizontales diversement colorées (phénomènes d'altération tardive des feldspaths). Situées au-dessus d'une surface de déflation, elles correspondraient pour partie à des feuillets de translation ascendante (amorce de dune) ou à des dépôts de tempêtes de sable figés par l'humidité temporaire, voire dans certains cas à une décantation de particules apportées au cours d'une inondation dans un environnement de type chott (étendue d'eau salée/présence de sulfates).

Comparaison de deux échantillons de grès vosgien du secteur de Lichtenberg :
- À gauche,
échantillon de grès sain de la carrière Loegel de Rothbach (hauteur 11 cm). Une stratification fine (oblique ici) est visible. Le grès de couleur rose, montre en lumière rasante des points brillants qui correspondent à des faces cristallines de quartz néoformé autour des grains d'origine (phénomène de nourrissage). L'observation à fort grossissement (loupe) montre des  grains polyédriques imbriqués, de tailles différentes (0,05 à 0,5 mm), à quartz abondant (SiO2 : 85%). Une matrice argilo-ferrugineuse unit les grains tout en ménageant des pores. La roche d'origine fluviatile présente une bonne résistance.
- À droite, échantillon de grès provenant de la dune de Reipertswiller (vue de surface). Les grains de taille homogène sont de forme sphérique et donnent à l'ensemble un faciès particulier : "Kaviarsand". La taille homogène des grains s'explique par un vannage des poussières fines et confirme l'origine éoliennne du dépot. La roche très poreuse n'est que partiellement cimentée par des microparticules et un "enduit" ferrugineux qui recouvre les grains confère à l'ensemble une teinte rouge brique à l'affleurement. Ces caractéristiques attestent encore une fois l'origine éolienne de la roche.

 

4. Emplacement des grès de Lichtenberg et des environs au sein du Buntsandstein

Le secteur de Lichtenberg se trouve dans la zone de transition entre les faciès vosgiens et les faciès définis dans le Palatinat observables dans le secteur nord à proximité de la frontière (cf notice de la carte géologique de Lembach).

Comparaison des séries gréseuses  du Buntsandstein des Vosges moyennes et méridionales (à gauche) et de son équivalent dans les Vosges du Nord et le Palatinat (à droite). Les séries rencontrées dans le secteur de Lichtenberg sont figurées par le trait vert. Au sud des Vosges, le Grès vosgien habituellement subdivisé en grès vosgien inférieur et supérieur est coiffé par le Conglomérat de Sainte Odile ( exconglomérat principal). Au nord, 3 unités hectométriques se succèdent. À la base, les Couches de Trifels sont formées de grès  grossiers en bancs lenticulaires. Au milieu de la série, les Couches de Rehberg voient apparaître des niveaux horizontaux de grès fins qui deviennent prépondérants dans les Couches de Karlstal. Le sommet des Couches de Karlstal comporte parfois des conglomérats remaniés (conglomérat de Grossbliederstroff / exconglomérat de Bitche). Les essais de corrélation à l'échelle du bassin germanique font encore l'objet de discussions.

 

Les assises de grès accusent un léger pendage vers le nord-ouest qui traduit le relèvement de la bordure vosgienne du rift rhénan. Le secteur se situe dans la partie supérieure du Buntsandstein moyen. L'érosion y a déblayé les Couches supérieures de Karlstal plus tendres, ne laissant subsister que quelques îlots résiduels formés par les Couches inférieures de K. (Schlossberg Schichten) et coiffés de conglomérat plus résistant (Karlstal Felszone / niveau rocheux des Couches de Karlstal). Le site du château de Lichtenberg constitue une butte-témoin. Les affleurements de Reipertswiller ( base de la coupe, au Km 0) et de Rothbach (carrière au Km 5) ) se situent à des niveaux différents au sein des Couches de Rehberg (sous les couches de Karlstal).

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Remerciements

L'auteur remercie Madame Francine Loegel (gérante de la société Carrière Loegel Rothbach), Monsieur Marc Durand (Maître de Conférences émérite à l'Université  de Nancy 1) et Monsieur Jean-Claude Gall (Professeur émérite à l'Institut de Géologie-Université de Strasbourg) pour les renseignements qu'ils lui ont fournis à l'occasion de la rédaction de la fiche.


Auteur : Etienne FEUCHTER - Date de création : 11/09/2014 - Dernière modification : 17/01/2015

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