La Saulx est un affluent en rive droite de la Marne (fig.7). Comme les autres rivières locales, elle s'écoule dans la région étudiée (le Barrois) selon une direction SE-NO dans les calcaires tithoniens (fig.6) avant de s'orienter franchement vers l'Ouest en traversant les dépôts sédimentaires crétacés du Perthois.

Fig.6: Lithostratigraphie dans le Jurassique Supérieur (données chiffrées = âges donnés en millions d'années - © BRGM).

La Saulx reçoit alors l'Ornain en rive droite puis conflue avec la Marne dans la partie aval de la région du Perthois près de Vitry-Le-François (fig.7) (1) (2) (3).

Fig.7: Bassin hydrographique de la Marne et géologie locale (1) (la flèche rouge
indique approximativement la position du paléoméandre de Stainville)

Le réseau hydrographique actuel est déjà globalement individualisé depuis le début du Crétacé et en place sur une surface d'érosion stable . Il va prendre ses caractéristiques actuelles (incisions) à la faveur du changement climatique qui apportera l'énergie nécessaire à son évolution (passage d'un climat tropical à un climat avec alternances d'épisodes glaciaires/interglaciaires) à la limite Pliocène-Quaternaire (1).

Il est communément admis (1)(6) que les processus généraux responsables de l'enfoncement des vallées et de la formation de terrasses étagées (mises à part les variations eustatiques pas à l'oeuvre ici) viennent des effets combinés des soulèvements et des cycles climatiques (facteur prépondérant = la température). En Meuse, l'activité tectonique est bien présente (subsidence du Perthois/surrection du Barrois, fossés d'effondrement...) et les épisodes climatiques se sont répétés durant tout le Quaternaire (glaciations alpines = alternances de périodes glaciaires/interglaciaires).

Le creusement a surtout été actif durant les périodes interglaciaires (énergie présente, fluides mobiles) et la sédimentation durant les épisodes plus froids (production importante de matériaux par cryoclastie). En moyenne une terrasse se forme tous les 100 ka (6) (cycle long de Milankowitch).

Le paléoméandre de Stainville est la trace d'une vallée fossile en fer à cheval empruntée antérieurement par la Saulx. Le plateau du Barrois (altitude 260m) domine la rive concave abrupte de 50 mètres environ (fig.8).

La Saulx passe actuellement à Stainville à une altitude voisine de 207 mètres. Le lit fossile (niveau Sa2 altitude 210 m) ne se situe donc que 3 mètres au dessus du lit actuel (niveau Sa0)(fig8)(3)(4).

Ce méandre très fermé a été creusé dans les calcaires du Jurassique supérieur (Tithonien) (fig.6). Une butte en forme de pépin, le Mont Dardel (altitude 238 m), a été laissée au coeur du méandre (= rive convexe en pente douce).

Le pédoncule du pépin a été recoupé par la Saulx qui a ainsi abandonné son lit antérieur pour son lit actuel.

L'étude de l'étagement des terrasses (fig.8, 9 et 10) (3)(4) et des phénomènes karstiques locaux (1)(2)(3)(4)(5) permettent d'expliquer l'organisation à l'echelle régionale du réseau hydrographique actuel.

Fig.8: Coupes types dans les vallées de la Marne (Joinville), de la Saulx (Stainville) et de l'Ornain (Saint-Joire) (4)

Fig.9: Niveaux d'incision de la Saulx et de l'Ornain dans le Barrois (3)

Les terrasses les plus anciennes sont étagées (fig.8, 9 et 10), établies sur la roche mère (bedrock), elles montrent bien l'incision répétée du plateau du Barrois. Les terrasses les plus récentes sont emboitées dans des dépôts fluviatiles qui sont remaniés au fil des dernières fluctuations climatiques mais sans abaissement significatif du niveau de base (fig.10).

Fig.10: Disposition et établissement des terrasses fluviatiles selon qu'elles sont étagées ou emboitées (7)

Eléments de bibliographie

(1)  LEJEUNE O. (2005) - Dynamiques d'érosion des bas plateaux de l'Est de la France : l'exemple du bassin versant amont de la Marne. Thèse de doctorat en Géographie Physique, Université de Reims Champagne Ardennes, 591 pages.

(2) HARMAND D. et al. (2002) - Incision ante- et post-capture dans les vallées de l'Ornain et de la Saulx (Est du Bassin de Paris, Revue Géographique de l'Est, Tome XLII, 4, pp. 171-183.

(3) HARMAND D. et al. (2004) - Dynamique de l'érosion dans le Barrois et le Perthois : Incision et karstification dans les bassins-versants de la Marne, de l'Ornain et de la Saulx, Quaternaire, 15, 4, pp. 305-318.

(4) COJAN I. et al. (2007) - Morphologic evolution of Eastern Paris Basin : "Ancient surfaces" and Quaternary incisions, Mémoires de la Société Géologique de France, 178, pp. 135-155.

(5) JAILLET S. (2001) - Un karst couvert de bas-plateau: le Barrois (Lorraine/Champagne France). Structure, fonctionnement, évolution, Revue Géographique de l'Est, vol. 41, 4.

(6) BRIDGLAND D., WESTAWAY R. et CORDIER S. (2009) - Les causes de l'étagement des terrasses alluviales à travers le monde, Quaternaire, 20, 1, pp. 5-23.

(7) BOULVAIN F. (2019) - Une introduction aux processus sédimentaires. Université Libre de Liège, belgique. http://www.geolsed.ulg.ac.be/processus/processus.htm