SVT Lorraine > Géologie Lorraine > Tertres de Baslieux >

Tertres de Baslieux : 5. Annexe I

Le Vallon du Fond de la Roche est un site protégé et entretenu par le Conservatoire d'Espaces Naturels de Lorraine (fig.9).

Fig. 9: Panneau explicatif du CEN Lorraine.

Ce site est remarquable à plusieurs titres : c'est une pelouse calcaire qui abrite des espèces rares et protégées (orchidées, reptiles, papillons...) mais également un travertin d'émergence en construction (voir aussi la fiche Boismont).

Remarque : La tufière est visible depuis l'autre versant de la vallée mais il est impossible de s'en approcher, toute la réserve étant clôturée. Elle sert de parc pour la pâture des moutons qui entretiennent la pelouse.

Cette tufière, le "Cron Roch" ou "Cron de la Roche" (fig.10)[1], se forme au lieu d'émergence de la nappe suspendue qui s'étend entre la base de l'Oolithe de Jaumont (Bajocien supérieur) et la formation marneuse imperméable sous-jacente apparentée aux Marnes de Longwy (Bajocien supérieur) - voir fig.5 dans la partie "Description".

Note: Le mot "Cron" vient de l'ancien français "créon" signifiant "craie" ou "calcaire". Ce terme est couramment utilisé en Belgique dans la Gaume voisine.

Fig. 10: Tufière du "Cron de la Roche" en février 2023.

Les calcaires du Bajocien sont intensément karstifiés. Les eaux météoriques peuvent dissoudre du CO2 et devenir acides ; elles deviennent alors agressives et dissolvent les calcaires (i) qu'elles pénètrent ; elles déposeront plus loin les carbonates qu'elles ont dissous lorsqu'elles pourront se dégazer (ii), soit en réapparaissant dans une galerie fossile ou à l'air libre.

(i) Dissolution des carbonates par les eaux acides contenant du CO2 : CaCO3 + CO2 + H2O  -->  Ca2+ + 2HCO3-

(ii) Précipitation des carbonates par dégazage du CO2 dissous:  Ca2+ + 2HCO3-   -->  CaCO3 + CO2 + H2O

Ces dépôts sont apparentés à des concrétions (comme le sont aussi les stalactites) ; ils sont formés en masse et rapidement, jusqu'à plusieurs mètres de dépôts par siècle parfois, par les tufières appelées localement "fontaines pétrifiantes" ou "crons". Les roches sédimentaires produites par précipitation sont des "tufs calcaires" ou "travertins-pierres de Tivoli" (fig.6) : des roches poreuses, vacuolaires (riches en vides ou empreintes laissés par la disparition des débris des végétaux précédemment encroûtés), peu denses, concretionnées, parfois litées, et surtout faciles à creuser ou à découper. Leur nom de tuf tient à leur ressemblance (porosité, légèreté, couleur...) avec le tuf volcanique. Pour éviter toute confusion, le terme de travertin s'impose dorénavant.

De part leurs propriétés, ces roches ont été souvent utilisées comme matériau de construction pour bâtir des voûtes (du fait de leur légèreté) et des cheminées (elles n'éclatent pas à la chaleur). Elles servaient également pour la production de chaux.

La formation des tufières est favorisée par:
- la présence d'êtres vivants photosynthétiques ou chlorophylliens connus comme précipitant le calcaire : des Bryophytes (Eucladium verticillatum en particulier), des Trachéophytes (Myryophyllum, Elodea, Potamogeton...), des Algues vertes, des Bactéries photosynthétiques... Ces êtres-vivants contribuent à une décalcification biogène de l'eau et montrent souvent un dépôt calcaire, un encroûtement, sur leurs parties immergées [2 et 3].
- des eaux froides plus riches en CO2 et donc plus concentrées en carbonates dissous qui, en se réchauffant, se dégazent et favorisent la précipitation des carbonates dissous ;
- l'agitation de l'eau avec un écoulement turbulent ou en cascade qui favorise le dégazage ;
- l'orientation du griffon de la source au sud (vallon ensoleillé) qui favorise l'évaporation ;
- la présence de roches contenant des sulfates (gypse ou anhydrite - comme c'est, par exemple, le cas à Klang en Moselle).

Références bibliographiques :

[1] Fizaine J.P. (2007) - le Cron de Baslieux, Université Ouverte des Humanités - UOH : Cron de Baslieux

[2] Pentecost A. (2005) - Travertine. Springer-Verlag Berlin-Heidelberg Ed., 445 pages.

[3] Symoens J.J., Duvigneaud P. et Vanden Berghen C., en collaboration avec Dewit J. et Kiwak A. (1951) - Aperçu sur la végération des tufs calcaires de la Belgique. Bulletin de la Société Royale de Botanique de Belgique, Tome 83, Fascicule 3, pp. 329-352.


Auteurs : Philippe MARTIN - Didier ZANY - Date de création : 22/02/2023 - Dernière modification : 29/08/2023

Fin de la fiche Baslieux (54) Suite Retourner à l'accueil Géologie de la Lorraine

Contact : Roger CHALOT (Géologie) - Christophe MARCINIAK (Réalisation)