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Etang de Lindre (57) : 3. Description

L'Étang de Lindre:

L'Étang de Lindre (fig.2 et 3) est une grande retenue d'eau (13 millions de m3) peu profonde (2 mètres en moyenne avec un maximum à 6 mètres), couvrant plus de 600 ha avec 27 km de rivages. Il est alimenté par un grand bassin versant de plus de 100 km2 (2). C'est une des nombreuses retenues d'eau régionales installées sur sous-sol argileux (Etang du Stock, Grand Etang du Mittersheim, Etang de Gondrexange...).

Cet étang très ancien (XIème ou XIIème siècle) est né de la fusion de plusieurs entités naturelles et a été créé pour fournir du poisson et du gibier d'eau aux habitants de la région. Le poisson permettait en particulier de subvenir aux besoins lors des vendredis "maigres" et durant la période du Carème. C'est le plus grand étang piscicole de France.

La digue de retenue actuelle aurait été créée au XVème par les Ducs de Lorraine. L'étang possédait aussi à l'époque un aspect stratégique. Ses eaux pouvaient être utilisées pour défendre la place forte de Marsal construite par Vauban. En rompant la digue, une vague pouvait rapidement inonder la vallée de la Seille et protéger Marsal, haut lieu de l'industrie du sel, ainsi que Dieuze et accessoirement Metz puisque la Seille y conflue avec la Moselle.

Fig.2 : L'Étang de Lindre regardé vers le SE (vue de Tarquimpol depuis la pisciculture du Domaine de Lindre).

Fig.3 : L'Étang de Lindre observé vers le NO (vue du Domaine de Lindre depuis Tarquimpol).

L'Étang de Lindre est un site Natura 2000 comme presque tout le territoire du Pays du Saulnois qui abrite de nombreuses espèces protégées

La Cigogne blanche (Ciconia ciconia) (fig.4), d'abord sédentarisée artificiellement par nourrissage et protection en volière durant la saison hivernale, est pratiquement devenue l'image du Domaine de Lindre.

Fig.4: La Cigogne Blanche (Ciconia ciconia) icône du Domaine de Lindre.

Les couples s'y sont maintenant installés en nombre et se reproduisent sur place (fig.5).

Fig. 5: Cigognes blanches en train de s'accoupler en mars 2024.

Tarquimpol (fig.6) est un village très ancien habité depuis l'époque romaine (Haut Empire Romain de 27 avant J.C. à 192 après J.C.). Tarquimpol qui s'appellait alors Decempaji, occupe une petite péninsule pénétrant dans l'étang en face de Lindre-Basse.

Le paisible petit village actuel est bâti sur les substructions de plusieurs cités romaines successives :

- Tarquimpol "l’Ancienne" occupant 45 ha et qui abritait un amphithéâtre de 125 mètres de diamètre (fig.7 ; description voir plus loin). Cette première cité a vraisemblablement été détruite au cours de la deuxième moitié du IIIème siècle après J.C.

- Tarquimpol "la Nouvelle" rebâtie sur les vestiges de l'ancienne cité et qui sera à son tour abandonnée en 450 après J.C. Cette nouvelle ville plus petite (emprise de 8 ha seulement) était protégée par un large mur d’enceinte. Elle a prospéré durant un siècle, puis tout semble s’être brusquement arrêté en 450. Ainsi, à ce jour, plus aucune trace d'occupation n’a été trouvée avant l'époque mérovingienne et ses sarcophages datés de l’an 600 environ et enterrés sous l’église actuelle (1).

Fig. 6: Le petit village de Tarquimpol sur sa péninsule.

L'important amphithéâtre romain de Tarquimpol "l'Ancienne" pouvait accueillir plusieurs milliers de spectateurs. Il a été découvert au début des années 1980 lors d'un survol aérien. La différence de désséchement entre les sols naturels intacts ou des niveaux remués et perturbés par des constructions en maçonnerie a révélé l'édifice. Il n'a pas encore été fouillé. Il atteste de l'importance que pouvait avoir la cité à l'époque romaine.

Fig. 7: Théâtre antique de Tarquimpol. (© Université de Lorraine)

D'anciennes traces d'une exploitation agricole du fond de l'étang lors de ses vidanges peuvent également être observées sous la forme de sillons parallèles lors des étiages (fig.8). Les vases amendent le sol et constituent un fertilisant naturel. En contrepartie, les végétaux qui vont coloniser ces rives lors de cette période d'émersion serviront ultérieurement de frayères pour la faune aquatique.

Fig. 8: Traces laissées par une exploitation agricole (sillons en bordure de la zone exondée) du fond de l'étang lors de ses vidanges. (© IGN-Géoportail 2024)

La rivière la Seille

La Seille prend naissance à la sortie de l'Etang de Lindre. Elle reçoit la Petite Seille affluent en rive droite lors de sa traversée du Saulnois. Elle conflue avec la Moselle à Metz.

Toute la vallée amont de la Seille appartient à la Communauté du Pays du Saulnois. Les noms des communes (Marsal, Château-Salins, Salonne) ou des sites (Abbaye de Salival, Saléaux, Saline Royale de Dieuze...) attestent de la présence et/ou d'une exploitation historique du sel.

Toute la zone est en effet sujette à des remontées d'eau salée depuis le sous-sol dans lequel les niveaux salifères du Keuper (fig.9) sont presque affleurants.

Fig. 9: Colonne stratifraphique locale: alternance de niveaux argilo-marneux et salifères.(© BRGM)

Des sources artésiennes sont à l'origine de la formation de mares salées dans les dépressions argileuses (fig.10 et 11).

Fig. 10: Mare salée dans la vallée de la Petite-Seille. ( © Guillaume Gama CEN)

Ces remontées ont été à l'origine de l'installation d'une importante "industrie" d'extraction du sel qui a débuté au Premier Âge du Fer de 800 à 450 avant J.C. (technique du Briquetage). Elle s'est poursuivie à l'époque romaine avec les puits de sel, particulèrement à Marsal (technique des patellas - voir la fiche Marsal) puis a traversé l'époque historique pour perdurer jusqu'au début du XXème siècle (Salines de Château-Salins, de Vic, de Moyenvic, de Chambrey, de Salonnes, de l'Abbaye de Salival, de Lezey-Saléaux et Saline Royale de Dieuze).

Ces complexes industriels fournissaient en premier lieu, du sel (chlorure de sodium NaCl) raffiné pour la table et les besoins des animaux d'élevage, mais également de la soude (carbonate de soude Na2CO3 et bicarbonate de soude NaHCO3) à Château-Salins et même du PVC (PolyChlorure de Vinyle (C2H3Cl)n avec n = 700 à 1 500) à l'Usine Elf-Atochem de Dieuze) (3).

Fig. 11: Mare salée dans la zone aménagée au pied des remparts de la cité fortifiée de Marsal.

Une flore halophile s'est installée et développée dans les mares salées. La Salicorne (Salicornia europaea - fig.12) appelée "passe-pierre" dans le Saulnois en est un des principaux représentants. C'est une plante annuelle dont les rameaux charnus succulents sont récoltés encore verts au tout début de l'été et conservés confits dans du vinaigre pour être utilisés comme condiments à la manière des petits cornichons.

 

Fig. 12: Une plante endémique du Saulnois : la Salicorne à des stades de maturité différents. Salicorne verte au printemps (© Les Amis du Saulnois et de son Patrimoine) et Salicorne rougeâtre au début de l'été (© Conservatoire des Sites Lorrains).

 

Bibliographie:

(1) http://blogerslorrainsengages.unblog.fr/2012/09/18/tarquimpol-a-la-recherche-de-l'antique-decempagi/

(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Lindre

(3) Le Coin des Becs Salés


Auteurs : Philippe MARTIN - Didier ZANY - Date de création : 08/03/2024 - Dernière modification : 24/05/2024

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Contact : Roger CHALOT (Géologie) - Christophe MARCINIAK (Réalisation)