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CASNAV-CAREP de l’académie de Nancy-Metz
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Centre Académique pour la Scolarisation des enfants allophones Nouvellement arrivés et des enfants issus de familles itinérantes et de voyageurs

Centre Académique de Ressources pour l’Education Prioritaire

Organisation au sein de la classe
Article mis en ligne le 17 juin 2014
dernière modification le 12 octobre 2023

par CASNAV CAREP Nancy-Metz

La gestion de l’hétérogénéité

Une des principales problématiques professionnelles que pose la scolarisation des élèves allophones est la gestion de l’hétérogénéité. La présence d’un ou plusieurs élèves allophones dans la classe ne crée pas l’hétérogénéité mais l’accentue. Ce sont des élèves qui :

 ont commencé un parcours scolaire ailleurs ;

 prennent en cours de route un chemin déjà commencé ;

 continuent à apprendre en fonction de ce qu’ils sont et de l’accueil qui leur est fait.

« L’enfant n’est pas une tasse vide, il a déjà des compétences qu’il peut transférer. Il faut l’aider à les mobiliser. »

Michèle Verdelhan-Bourgade

Une prise en charge spécifique reste indispensable : pour les enseignants, il s’avère impossible d’enseigner le même programme quel que soit le parcours antérieur de l’élève. La différenciation pédagogique va être une réponse à l’hétérogénéité des élèves. Mettre en œuvre la différenciation pédagogique et l’individualisation des apprentissages, c’est accepter de faire varier :

→ le cadre et les contraintes matérielles

  • permettre aux élèves de disposer et d’utiliser librement différents référentiels ;
  • leur permettre d’accéder aux ordinateurs (utilisation de logiciels adaptés...) ;
  •  possibilité pour les EANA de travailler sur des résumés des textes plutôt que sur des textes entiers...

→ le contexte

  • adapter le travail tout en permettant à l’élève nouvellement arrivé de faire comme les autres ;
  •  adapter et simplifier les consignes, le support ;
  •  utiliser différemment les manuels scolaires.

→ les types de situation

  • tutorat : éviter d’isoler l’élève, lui proposer un voisin, des tuteurs pour les apprentissages, mais aussi pour les déplacements, la récréation, la cantine, etc.
  •  activités en situation duelle : prévoir à chaque séance un moment spécifique avec l’élève ;
  •  activités collectives ;
  •  activités en autonomie : décrochage du travail collectif avec des activités réalisables en autonomie, proposition d’activités adaptées spécifiques ;
  •  groupe de niveaux, groupes de besoins.

Afin de tenir compte de la spécificité de la situation des élèves nouvellement arrivés en France, il est souhaitable d’adapter les critères de notation. Une évaluation formative de la production de l’élève sera privilégiée.

 

Prise en charge dans les différentes disciplines

« Savoir se débrouiller à l’oral dans des situations de communication courante, mobiliser un lexique simplifié mais approprié et quelques structures syntaxiques de base ne signifient pas que l’on puisse réussir à l’école. La langue d’enseignement est un médium incontournable d’accès à toutes les disciplines du fait de l’existence d’une communication spécifique à la communauté scolaire : c’est une langue de concepts, de la distance, du récit, des savoirs. »

RAFONI, Jean-Charles, Apprendre à lire en français langue seconde, L’Harmattan, 2007.

Importance des compétences de lecture

Les compétences de lecture et d’écriture vont être décisives pour la réussite scolaire de tous les élèves à l’école, au collège et au lycée.
Il ne suffit pas d’assembler les lettres pour comprendre et lire le sens d’un mot. Les difficultés inhérentes à l’apprentissage de la langue maternelle le seront davantage encore en langue seconde puisqu’un élève non francophone n’a pas à l’oral la maîtrise phonologique et syntaxique du français. Il ne dispose pas des mêmes références culturelles, ni du lexique approprié.

« Le traitement sémantique de l’écrit est essentiellement commun à l’activité de lecture dans toutes les langues. Il n’en est pas de même du traitement linguistique. » (Jean-Charles Rafoni)

Cas des élèves qui ont déjà appris à lire dans une langue alphabétique

- Des élèves qui ont besoin d’apprendre les spécificités du code écrit français.

 Des élèves qui ont déjà compris le principe alphabétique.

 Des élèves qui ont déjà compris que l’écrit code essentiellement les sons de la langue.

Cas des apprentis lecteurs ou lecteurs experts dans leur propre langue sur caractères non latins (alphabet arabe, tamoul, khmer, idéogrammes chinois, kana japonais...)

Ces élèves ont acquis des stratégies de lecture mais doivent réapprendre à lire dans notre système alphabétique. L’apprentissage initial du code sera indispensable.

Cas des élèves non lecteurs dans leur langue d’origine

Ces élèves sont parfois confrontés pour la première fois à un encodage de la langue. Souvent, ils n’ont que très peu bénéficié de l’initiation préalable aux activités graphiques, aux jeux de langues, aux activités de conscience phonologique. Pour eux, l’entrée dans la culture écrite va être un véritable enjeu. La plupart des méthodes de lecture sont conçues pour des élèves natifs et monolingues. La langue y est considérée comme acquise. Pour aider l’élève non francophone non lecteur, l’enseignant devra agir sur plusieurs aspects de la lecture :

  • l’aspect culturel (pratique du livre, de l’album, expérience de l’écrit, connaissance de la fonction des écrits, référents...) ;
  • le rapport au savoir, le projet de lecteur de l’élève ;
  • l’aspect linguistique (principe alphabétique, conscience phonologique, correspondances graphie/phonie...) ;
  • la conceptualisation de la langue (sens conventionnel de la lecture et de l’écriture, relation entre quantité d’oral et quantité d’écrit, connaissance du langage technique : lettre, mot...) ;
  • les stratégies d’identification de mots nouveaux (prise d’indices...) ;
  • la structuration du temps et de l’espace ;
  • la compréhension (anticiper la structure du récit à partir d’une image, anticiper la fin d’un récit, explorer et questionner un texte...).

Lire le résumé de la conférence de J-C Rafoni, Apprendre à lire en français langue seconde

 

Utilisation des manuels scolaires : de l’objet d’apprentissage à l’outil d’apprentissage.

L’utilisation de manuels scolaires peut mettre l’élève en difficulté de lecture et de compréhension. En effet, souvent le niveau des élèves est mis en cause sans penser qu’ils doivent mettre en œuvre une multiplicité de savoirs pour entrer dans ces manuels. Les obstacles sont multiples car l’élève est confronté à des interactions de codes multiples :

 difficultés méthodologiques (utilisation de cartes, plans, tableaux...) ;

 difficultés linguistiques (des termes parfois polysémiques : mots connus dans une certaine acception mais qui prennent un autre sens dans un domaine spécifique, une syntaxe souvent très complexe, des structures linguistiques spécifiques pour chaque type de texte...) ;

 confusions référentielles : complexité des illustrations... ;

 confrontation à un condensé d’informations sans connaissance préalable, difficultés pour repérer et hiérarchiser les informations.

Il s’agit dans les différentes disciplines de travailler sur et avec le manuel scolaire afin de développer :

 des savoirs (lexique spécifique, différents champs sémantiques d’un mot...) ;

 des savoir-faire (traiter l’information, se documenter, expliciter ses démarches...) ;

 des savoir-être (exercer un regard critique, être curieux face à un document...).

Exemple des mathématiques

Les mathématiques sont une des premières activités où l’élève allophone peut être totalement intégré dans la classe.

Il existe, pour les mathématiques, différents documents d’évaluations (consulter les évaluations disponibles). Cette évaluation de départ en mathématiques peut permettre de situer l’élève allophone par rapport à sa classe. Pour les élèves qui n’ont pu effectuer l’ensemble des exercices du niveau estimé, il est utile de proposer quelques exercices des niveaux inférieurs pour mieux repérer les acquis réels. Deux cas sont possibles :

- L’élève a plus ou moins le niveau de sa classe : dans ce cas, le travail portera essentiellement sur le vocabulaire spécifique des mathématiques.

  L’élève n’a pas le niveau de sa classe (cas des enfants peu scolarisés antérieurement). Il s’agit alors d’adapter les connaissances de l’enfant (qui sont souvent importantes) aux exigences scolaires.

Le langage des mathématiques n’est pas universel. La part du français reste importante.
En mathématiques, l’explicitation scolaire est le garant de la maîtrise du concept en jeu, atteste des acquis, son absence est alors l’indice d’une ignorance. Il y a complémentarité entre compétences mathématiques et linguistiques. Dans tous les cas, le langage mathématique va constituer un point de départ pour élargir les connaissances linguistiques des élèves autant que pour les accompagner sur le chemin de l’abstraction.
Quelques pistes :

 Donner une place privilégiée à l’oral dans l’activité mathématique.

 Construire un lexique pour appréhender la polysémie de certains termes (sens différent en mathématiques et dans la langue du quotidien : face, table...).

 Vérifier individuellement la compréhension des consignes données.

 Utiliser la médiation du jeu.