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Dolomie de Beaumont : 3. Description

La carrière de Villacourt se présente au milieu d'une clairière, dans laquelle on accède au sommet d'un front de taille modeste, haut de trois mètres, structuré en gradins et au pied duquel s'accumulent des blocs de roche débités en gros pavés. L'endroit ne présente pas de danger particulier (fig.2).
Cette carrière, exploitée jusqu'au milieu du siècle dernier, fournissait des matériaux utilisés comme pierre à bâtir ou de parement.
 

 
Fig.2: Le front de taille en gradins de la carrière de Villacourt
 

Le plancher de la carrière est par place de nature argileuse favorisant l'apparition de mares.

Sur le front de taille, les roches dures sont disposées en strates horizontales décimétriques séparées parfois par de fins interlits argileux. On n'observe pas de structures sédimentaires particulières hormis la présence de vacuoles de dissolution millimétriques (voir plus loin) dans les bancs supérieurs. Un échantillon pétrographique dévoile une roche de couleur beige, veinée de rose ou de grenat parfois, ressemblant à un calcaire micritique ou sublithographique (fig.3 et 4).
 


Fig.3: Échantillon pétrographique de dolomie non vacuolaire



Fig.4: Échantillon de dolomie présentant des veines de couleur grenat

Un test à l'acide (à froid) se révèle négatif. A chaud, le test est positif et permet de reconnaître la nature dolomitique de la roche (carbonate de calcium et de magnésium).
Les fossiles (gastéropodes et bivalves) sont rares et peu diversifiés (Hilly et Haguenauer 1979).

Cette série carbonatée fait partie de la Dolomie (d'Elie) de Beaumont, datée du Trias supérieur (Keuper moyen). Sa puissance totale avoisine les dix mètres (fig.5).
 


Fig.5: Position stratigraphique des terrains affleurant à Villacourt
 
A l'extrémité ouest de la carrière, un ancien front de taille, dissimulé par la végétation, est encore visible (fig.6). Son accès est délicat car en arrière d'une de ces étendues d'eau qu'il faut traverser à gué.
 


Fig.6: L'ancien front de taille (partie ouest de la carrière)

La succession des bancs est toutefois observable en continu sur une hauteur de trois mètres (fig.7) : une douzaine de couches décimétriques dolomitiques présentant des lamines horizontales mises en relief par l'érosion.

Fig.7: Coupe schématique de l'ancien front de taille de la carrière de Villacourt

Les bancs de la moitié supérieure sont parsemés de petites cavités vacuolaires, de taille millimétrique (fig.8). Ces vacuoles peuvent être plus grosses (centimétriques) notamment dans les échantillons provenant de pierres volantes récoltées dans les champs voisins (fig.9).
 


Fig.8: Échantillon de dolomie à vacuoles millimétriques (banc n°12, fig.7)



Fig.9: Échantillon de dolomie à vacuoles centimétriques ("pierre volante")

Ces cavités résultent d'une dissolution de certains minéraux primaires (gypse ou anhydrite) à l'issue de la diagenèse de la roche.
A noter également, au sommet de certains bancs, la présence de surface ondulée illustrant un hydrodynamisme peu élevé dans un milieu très peu profond. Certaines déformations montrent une section carrée rappelant la forme des cristaux de halite qui auraient pu se former, avant de se dissoudre, en surface du banc de dolomie (fig.10).
 


Fig.10: Surface ondulée et structures à section carrée (sommet du banc 8, fig.7)


La Dolomie de Beaumont illustre un épisode de la formation de la série évaporitique du Keuper lorrain à la fin du Trias (Pautrot 2006, Gall et al. 1975 ; voir aussi l'annexe scientifique "Roches sédimentaires" sur ce site). A cette époque, le Bassin Parisien forme une vaste plaine sans relief, envahie par une mer épicontinentale très peu profonde, la Mer Germanique, transgressant d'est en ouest. Sous un climat aride, l'évaporation est importante et quasi-permanente, favorisant ainsi la formation de dépôts évaporitiques mêlés aux apports terrigènes argileux (= Marnes irisées). Selon l'intensité de l'évaporation, la dolomite à l'origine de la dolomie se forme d'abord, puis les sulfates de calcium à l'origine du gypse et de l'anhydrite, et la halite donnant le sel gemme lorsque la tranche d'eau est très faible et l'évaporation, au plus fort.


Bibliographie

Gall J.-C., Haguenauer B., Hilly J. et Perriaux J. (1975) - Environnements continentaux et marins du Trias et du Jurassique de l'Est du Bassin de Paris. IXe Congr. int. de Sédimentologie, Nice 1975, excursion 18.

Hilly J. et Haguenauer B. (1979) - Guides géologiques régionaux - Lorraine Champagne ; Masson éd.

Pautrot C. (2006) - Les évaporites du Keuper in Lexa-Chomard A. et Pautrot C. "Géologie et géographie de la Lorraine". Serpenoise éd.

Auteur : Didier ZANY - Date de création : 17/08/2009 - Dernière modification : 02/08/2024

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