Le vallon a été creusé par le Madon (affluent rive gauche de la Moselle) et quatre autres petits ruisseaux secondaires, dans les Grès à Voltzia et les Grès des Couches Intermédiaires du Buntsandstein Supérieur (fin du Trias Inférieur)(fig.2).

Fig. 2: Place des couches intermédiaires dans la stratigraphie du Buntsandstein Supérieur (données chiffrées = âges en millions d'années - © BRGM).

Le Madon prend sa source en haut du vallon, non loin du point culminant des Monts Faucilles, le Ménamont (467 m) situé sur la commune de Vioménil (88260).

Ces Grès Bigarrés colorés par les oxydes de fer se sont mis en place dans un environnement passant progressivement d'un milieu fluviatile vers un milieu deltaïque (1)(2)(3), paléogéographie localement confirmée par l'observation sur les parois rocheuses de vestiges de chenaux et leurs stratifications entrecroisées (fig.3) ainsi que de très belles empreintes de fossiles de végétaux continentaux sur certains blocs de grès en bordure des chemins (fig.4).

Fig. 3: Affleurements de grès indurés (Couches Intermédiaires du Buntsandstein)

Fig. 4: Empreinte de fronde de Fougère

A la fin du Trias Inférieur, la végétation était dominée par des Conifères (genre Voltzia), cohabitant avec des Fougères (genre Anomopteris) et des Equisétales ou Prêles (genres Equisetites, Schizoneura) (1)(2).

Ce site a été occupé par l'Homme depuis la Préhistoire, au moins depuis le Paléolithique Supérieur puisque des fragments de débitage de silex y ont été retrouvés. Le vallon est situé sur la commune d'Escles, village construit sur un important carrefour de plusieurs voies romaines.

Longtemps improprement appelé "Vallon Druidique" lorsqu'on n'expliquait pas encore correctement la plus grande partie de tous les vestiges issus de différentes époques qu'il recélait, il a été plus récemment mis en valeur et la majeure partie des traces archéologiques ont de nos jours été explicitées. Aucune des nombreuses fouilles n'a encore livré de vestiges gaulois (4)(5)(6), d'où l'abandon de l'appellation "druidique"!

Il comprend:

- un ancien ermitage (fig.5)(site de la Chapelle St Martin actuelle reconstruite en 1958) dans une clairière bordée de belles roches.

Fig. 5: Vue de la Chapelle St Martin actuelle

Une ancienne galerie (fig.6) avec quatre puits (dont trois font 4 à 5 m de profondeur) (fig.7) s'ouvre sous le porche de la plus imposante des roches. L'accès à la galerie est condamné par une porte et donc interdit d'accès. Si par hasard, celle-ci était ouverte, ne pas s'engager dans le boyau sans une bonne lampe et faire très attention aux puits.

Fig. 6: Entrée de la galerie aux quatre puits

Fig. 7: Intérieur de la galerie avec les puits n° 1 et n°2

Les traces d'une cheminée, de poutrages, d'auges, ... attestent d'une occupation humaine. La fouille des puits a livré du mobilier en bois et des outils de carrier. L'origine et l'utilisation de la grotte et des puits sont encore discutées (glacière, exploitation d'une petite veine d'oxyde de manganèse, site dédié au culte de Mithra, simple abri d'ermite, ...).

Trois fontaines alentours, la Fontaine Sainte Barbe (auparavant utilisée pour soigner les maladies de peau), la Fontaine Sainte Claire (utilisée pour soigner les maladies des yeux ?) et la Fontaine "Le Boeuf" ornée d'une tête de bovidé (fig.8), refaite en 1996 après que la pierre qui l'ornait ait été dérobée.

Fig. 8: La fontaine "Le Boeuf"

Ces fontaines et le Madon alimentaient un étang aujourd'hui disparu et dont l'ancienne digue a servi de support lors de la construction du chemin qui mène à l'ermitage.

- une motte castrale (le Châtelet) du Haut Moyen Âge en partie bâtie avec des blocs gallo-romains de récupération. L'existence d'un système défensif plus ancien (éperon barré) a été supposée mais n'est pas avérée. Néanmoins sur le terrain, deux vallum sont encore visibles.

- un cuveau en grès de plus de 3 m de diamètre (fig.9) et de 45 cm de profondeur, à bord octogonal, en place sur son site de taille ( "le Cuveau des Fées"), abandonné après qu'une fissure soit apparue dans sa structure. Sa destination et son utilisation sont sujettes à hypothèses (piscine baptismale, auge pour une fontaine de place de village,...)

Fig. 9 : Le Cuveau des Fées

- une carrière de meules (fig.10)(un site d'exploitation identique est connu dans la forêt de Serre à Offlanges 39290) datée du XVII par des monnaies ducales trouvées lors de fouilles.

Fig. 10: Le carrière de meules à aiguiser

- plusieurs carrières de débitage de blocs de grès (anciennement nommées "amphithéâtre", "fanum") et de nombreuses traces de débitage.

- de très nombreux pétroglyphes (signes religieux, dessins, triples enceintes, graffitis...)

Cette énumération n'est pas exhaustive ; voir (4)(5) et (6) pour de plus complètes descriptions et explications.

L'auteur tient particulièrement à remercier Olivier BERTIN et Jean-Jacques GAFFIOT de l'association Escles Archéologie (Association Escles Archéologie, 3, rue de l'église, 88260 Escles, http://www.histoire-patrimoine-vosges.org/association-escles-archeologie) pour leurs conseils et leur aide précieuse.

Bibliographie:

(4) CHERY J. (2008) - A la découverte du Vallon St Martin (partie 1). Forêt Magazine, n° 71, pp. 8-11.

(5) GAFFIOT J.J. (2008) - A la découverte du Vallon St Martin (partie 2). Forêt Magazine, n° 72, pp. 20-22.

(6) BERTIN O., FETET P. et GAFFIOT J.J., (1998) - Le Vallon Saint-Martin (Vosges), Association Escles-Archéologie, I.S.B.N.2-9511899-0-7, 63 pages. (Ce document est consultable à la BMI d'Epinal).