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Carrière des Rays à Gondreville : 3. Description

L'ancienne carrière se présente dans une dépression topographique semi-circulaire bordant le chemin de champ menant à la ferme du Fays.

A l'intérieur, plusieurs fronts de taille, encore visibles, se succèdent du sud (entrée de la carrière) au nord. Plusieurs paliers permettent d'accéder à la totalité des affleurements s'échelonnant sur une hauteur de cinq mètres environ (fig.2).


Fig.2 : Entrée et partie sud de la carrière

Les roches disposées en strates horizontales, d'épaisseur décimétrique, sont essentiellement des calcaires blancs oolitiques. Ils appartiennent à la formation de l'Oolithe Miliaire Supérieure datée du Bajocien supérieur (Jurassique moyen - fig.3). Seul le sommet de cette formation, qui peut atteindre 25m-35m d'épaisseur au total (Flageollet et al. 1985), est représenté ici.
La formation bathonienne sus-jacente, la Caillasse à Anabacia, n'a pas été observée dans la carrière mais affleure aux alentours (Villey-le-Sec, Fontenoy-sur-Moselle).



Fig.3: Position stratigraphique des terrains affleurant dans la carrière des Rays
(à gauche : âges en millions d'années)



De la base vers le sommet, on observe la succession de bancs suivante (fig.4):


Fig.4 : Coupe lithostratigraphique de la carrière des Rays

Le plancher de la carrière repose sur une calcarénite oolitique blanche de type grainstone, caractéristique de la formation. Son épaisseur visible à l'affleurement est d'environ un mètre.
Au-dessus, quelques bancs (sur 1,5 m d'épaisseur) à aspect rognoneux, de calcaires fins micritiques, de couleur beige à passées ferrugineuses, renfermant encore quelques oolites et des fossiles (rhynchonelles, gastéropodes notamment), interrompent la sédimentation oolitique dominante de la série. Par endroits, ces bancs peuvent présenter un aspect bréchique ou renfermer des accumulaltions de coquilles, des figures sédimentaires souvent associées à des dépôts de tempêtes (= tempestites).

Le sommet de cet ensemble constitue un premier palier à la base d'un deuxième front de taille qui longe le flanc ouest de la carrière. Celui-ci, d'une hauteur de deux mètres environ jusqu'au deuxième palier (fig.5), montre essentiellement des strates de calcaire oolitique de type grainstone.


Fig.5 : Un des fronts de taille de la carrière

L'extrémité nord de la carrière (fig.6) permet d'observer les derniers bancs affleurant le long d'un ancien front de taille d'une hauteur de 2,5 mètres environ. A la base, on retrouve les bancs de calcaire oolitique (et bioclastique) qui se poursuivent encore sur une épaisseur de 1,5 mètre.
Au-dessus d'un joint marneux de transition, le sommet du front de taille présente une succession de bancs de calcaires coquilliers (coquilles entières recristallisées dégagées par l'érosion) et micritiques, de couleur beige à gris, à passées ferrugineuses. Les fossiles les plus courants sont des brachiopodes (térébratules et rhynchonelles), des bivalves (genre Trichites notamment), des gastéropodes et des entroques (radioles de Cidaridés). Les oolites disparaissent dans les derniers niveaux.
La bioturbation est importante et les nombreux terriers sont remplis de matériel ferruginisé.


Fig.6 : Partie nord de la carrière

Les bancs sommitaux sont constitués de calcaires très fins de type lithographique (partie N de la carrière). Le toit du dernier banc est souligné par une surface qui semble perforée et fissurée (fig.7). Ces "pseudo-perforations" sont en fait d'anciennes branches de coraux dissoutes et remplacées par du matériel ferrugineux ou calcitique (fig.8). Des reliques de polypiérites sont par endroits encore reconnaissables (fig.8). Ce faciès correspond à celui des Polypiers de Husson, équivalent latéral de l'Oolithe Miliaire Supérieure, localement présent dans le secteur de Toul (cf. fiche Aingeray). A Gondreville, seule la partie terminale de l'Oolithe Miliaire Supérieure semble affectée par ce changement de faciès.
Les transformations ferrugineuses d'origine diagénétique du banc sommital sont vraisemblablement à mettre en relation avec les surfaces rubanées qui affectent le sommet de la formation de l'Oolithe Miliaire Supérieure et observées en d'autres endroits de la région (cf. fiches de Villey-St.-Etienne, Bicqueley...). Ces structures indiquent un arrêt de sédimentation au passage Bajocien supérieur - Bathonien. Bien que ce contact ne soit pas observable dans la carrière, des échantillons du polypier solitaire Chomatoseris, récoltés en champ aux alentours (ouvrage de Fays), traduisent la proximité de la Caillasse à Anabacia du Bathonien inférieur.


Fig.7 : Banc sommital correspondant au faciès "Polypiers de Husson" (les "pseudo-perforations" apparentes en surface correspondent à des reliques de coraux)


Fig.8: Le banc sommital contenant des reliques ferruginisées de branches de coraux

La formation de l'Oolithe Miliaire Supérieure témoigne d'une sédimentation de plate-forme carbonatée mise en place au cours du Bajocien supérieur dans l'est du Bassin parisien.
Les calcarénites oolitiques sont interprétées comme des éléments d'une vaste barrière oolitique sous-marine de type Bahamas qui s'étendait alors des Vosges occidentales, au sud, à l'Ardenne, au nord (Pautrot et al. 2006). Cette barrière séparait un domaine interne abrité, à l'ouest, d'un domaine externe ouvert, à l'est. Le faciès oolitique traduit également des conditions de sédimentation sous une faible tranche d'eau correspondant à la zone intertidale à subtidale (fig.9), soumise à l'action des vagues de beau temps et des courants de marée (Ledit 1985 et Lathuilière et al. 2003).




Fig.9 : Répartition des environnements sur une plate-forme avec barrière (d'après Boulvain 2010) et conditions de sédimentation de l'Oolithe Miliaire Supérieure du Bajocien de Lorraine

 

Bibliographie et sitographie

- BOULVAIN F. (2010) - Eléments de sédimentologie et pétrologie sédimentaire - Univ. Liège, Dept. de Géologie - http://www2.ulg.ac.be/geolsed/sedim/sedimentologie.htm


- FLAGEOLLET J.-C. et al. (1985) - Notice explicative de la feuille de Toul à 1/50 000 - BRGM
 éd.

- LATHUILIERE B. et al. (2003) - Production carbonatée dans le Jurassique de Lorraine - Livret de terrain - G2R, CR 54, Groupe Français d'Etude du Jurassique


- LEDIT D. (1985) - Etude sédimentologique de l'Oolithe Miliaire Supérieure (Bajocien terminal) de Pierre-la-Treiche (54): structures sédimentaires d'origine tidale et fracturation synsédimentaire - Rapport de DEA, Univ. Nancy I

- PAUTROT C, LE ROUX J. et BUFFETAUT E. (2006) - La plate-forme carbonatée du Jurassique moyen in A. LEXA-CHOMARD et C. PAUTROT "Géologie et géographie de la Lorraine. Serpenoise éd., p.112-117.
 

 

 


Auteur : Didier ZANY - Date de création : 06/11/2010

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