La Canner, dans son cours subséquent (perpendiculaire aux cuestas) et orthoclinal (perpendiculaire au pendage des couches géologiques) vers le Nord, a mis à l'affleurement les Grès rhétiens qui forment un bel escarpement sur sa rive droite entre Vigy et St.-Hubert (fig.1 et 2).

Fig. 2: Vue d'ensemble d'une des carrières ouverte dans les grès rhétiens

Les meilleurs affleurements sont concentrés dans d'anciennes carrières dont les fronts de taille sont bien visibles de la route. Il s'agit de pans verticaux sur lesquels la végétation a du mal à s'installer durablement du fait du manque de cohérence de la roche (fig.3).

Fig. 3: Falaises de Grès rhétiens

Ces grès mal cimentés et très friables ont un débit qui ne respecte pas les habituelles limites de bancs. La porosité de la roche est favorable à la circulation de l'eau, créant des zones de fissures le long desquelles le roche peut se déliter et s'éroder. Le résultat de cette altération physique confère parfois un aspect chaotique aux parois des falaises (fig.4).

Fig. 4: Les Grès rhétiens, des grès blancs mal consolidés - vue du front de taille (A) et gros plan (B)

À l'échelle de l'affleurement comme à l'échelle de l'échantillon pétrographique, les grès présentent un aspect homogène. Les figures sédimentaires telles que les stratifications obliques visibles sur d'autres sites lorrains où affleurent cette même formation (Coyviller, La Neuveville-sous-Châtenois), ne sont pas observables ici. La roche, de couleur gris-beige, est un grès fin, provenant d'un sable bien trié - un tamisage révèle une majorité de grains dans la tranche 0,250 - 0,125 mm - où domine largement le quartz (environ 90% de la composition). Le test à l'acide s'avère négatif. Des paillettes de mica blanc (muscovite) sont également présentes et scintillent en surface de la roche. Ce minéral caractérise les roches de la lithosphère continentale - micaschiste, gneiss, granite - et provient vraisemblablement de l'érosion de ces matériaux qui pouvaient constituer le socle des massifs hercyniens alentours. Un examen du grès à la loupe binoculaire montre des grains de quartz à morphologie subémoussée à émoussée et d'aspect luisant ce qui traduit un transport par l'eau, en milieu fluviatile et/ou marin, relativement long. Les résultats de l'analyse granulométrique du grès font plutôt pencher pour une origine marine (cf. Partie "Activités réalisables" ci-après). À Vigy, les Grès rhétiens ne sont pas fossilifères.

D'après la notice de la carte géologique d'Uckange, des bone-beds sont cependant présents à la base de la formation. Ils contiennent généralement des restes de vertébrés (fig.5) : principalement des dents de poissons chondrichthyens et ostéichthyens. La faune du Rhétien de Lorraine et des contrées limitrophes (Belgique et Luxembourg) est également célèbre pour ses dents des tout premiers mammifères terrestres connus (genre Morganucodon et aff.). Les restes de non vertébrés sont aussi représentés dans certains bancs de la formation : ce sont notamment des coquilles de bivalves marins du genre Rhaetavicula de la famille des Ptéridés.

Fig. 5: Fossiles (dents, débris osseux) d'un bone-bed des Grès rhétiens de la région de Nancy (cliché © S. Vitzthum)

Les Grès du Rhétien sont considérés comme des dépôts marins littoraux confinés pouvant par moments subir des influences de milieu marin ouvert. Avec les Argiles rouges de Levallois (cf. fiche Poussay), d'origine continentale, qui les surmontent, les Grès rhétiens marquent la fin du Trias dans la série stratigraphique de l'est du Bassin Parisien (fig.6).

Fig. 6: Place des Grès rhétiens dans la série stratigraphique lorraine (données chiffrées = âges en millions d'années - © BRGM).

Le contexte géologique dans lequel se met en place la formation des Grès du Rhétien est rapporté dans les fiches Coyviller et La Neuveville-sous-Châtenois auxquelles on pourra se référer.

Dans le Bassin Parisien, la fin du Trias se caractérise par la mise en place de dépôts argileux dolomitiques dans un environnement de type playa ou sabkha côtière sous climat aride (fig.7). Ils constituent le sommet des Marnes irisées supérieures (cf. fiche Florémont) du sommet du Keuper moyen (= Norien). Les Grès du Rhétien progradants qui font suite à ces dépôts se mettent en place dans un contexte transgressif, synchrone de l'ouverture de l'Océan Téthys, amorcée avec le début de fragmentation de la Pangée. Les Argiles de Levallois marquent un bref retour à une sédimentation à influence continentale avant la grande trangression jurassique dans la région.

Fig. 7: Paléoenvironnements à la fin du Trias dans le Bassin Parisien
(d'ap. cpgeosystems.com et Bourquin et al., 2002)

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Remerciements

Un grand merci à Stéphane Vitzthum pour le cliché de bone-bed.

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Bibliographie

BOURQUIN S., ROBIN C., GUILLOCHEAU F. et GAULLIER J.-M. (2002) - Three-dimentional accomodation analysis of the Keuper of the Paris Basin : discrimination between tectonics, eustasy and sediment supply in the stratigraphic record. Marine and Petroleum Geology, 19, p. 469-498.

BOURQUIN S. et DURAND M. (2007) - International Field Workshop on ‘The Triassic of eastern France’ - Livret d'excursion - Mémoires Géosciences Rennes, hors-série n°5, 80 pages.

PAUTROT C. (2006) - Les évaporites du Keuper in Lexa-Chomard A. et Pautrot C. - Géologie et géographie de la Lorraine. éd. Serpenoise.

Sitographie

Cartes paléogéographiques : site du Colorado Plateau Geosystems, Inc.