Muschelkalk dans la Bermelslach à Sarreinsming : 3. Description
La description qui suit peut être utilisée soit comme une excursion purement virtuelle, soit comme une approche pour des investigations sur le terrain. A la fin de la première partie du parcours aval (Arrêt 5), elle propose un premier bilan. Il est possible alors de continuer le trajet pour aboutir au modèle tectonique proposé (Annexe 2). A tout moment, il est possible de recourir aux informations concernant les faciès du Muschelkalk local en Annexe 1.
AVANT DE COMMENCER :
disposition des terrains en amont du site de la Bermelslach.
Vue de la rive gauche de la Sarre entre Zetting et Sarreinsming (croquis de l'auteur). A environ 1 kilomètre en amont de la Lach, à Zetting, se trouvent d'anciens sites d'exploitation de calcaires. La série complète allant des Couches grises (t4b) via le Calcaire à entroques (t5a) jusqu'aux Couches à Cératites (t5b) est présente près du pont sur la Sarre (croquis) mais masquée actuellement par la végétation.
RANDONNEE GEOLOGIQUE.
PREMIERE PARTIE : le cours inférieur de la Lach.
Arrêt 1 : Quelques dizaines de mètres en amont du pont, un premier affleurement situé en rive droite, dans un coude du ruisseau, montre une alternance de marnes et de carbonates en lits épais de quelques centimètres. La teinte dominante est le gris. A chaque crue importante, la rive exposée à la violence du courant est érodée et l'affleurement ainsi entretenu. Le pendage apparent est parallèle au talweg, le pendage réel est légèrement oblique en direction du sud-ouest.
En remontant le cours, on croise un ruisselet confluent sur la gauche et tout de suite après, apparaît un deuxième affleurement.
Arrêt 2 : Marnes et bancs plus durs sont toujours au rendez-vous et amorcent sur la droite une légère gouttière d'où jaillit un filet d'eau (image de droite). En glissant sur le rebord des strates, l'eau produit un encroûtement (travertin) colonisé par les mousses.
A présent débute la partie forestière du parcours.
Arrêt 3a : En amont d'une vasque (visible au premier plan) qu'on pourra contourner par la droite, le ruisseau s'étale sur une dalle calcaire exempte de dépôts. La surface structurale offre un aspect en "tôle ondulée". Les reliefs décimétriques en vagues sont disposés obliquement par rapport au cours. Bien qu'érodées superficiellement, les rides de fond marin (ripple marks) sont encore reconnaissables. On trouve un autre exemple d'affleurement remarquable de ce type à 12 km au nord-ouest -voir fiche correspondante : dalle à rides du Birzberg
Arrêt 3a détail : Quelques rides de fond sont visibles. Leur écartement moyen est de 50 cm, leur orientation à cet endroit est comprise entre 90° et 100° Nord.
Dans ce secteur, il arrive qu'un arbre tombé barre partiellement le lit du ruisseau...
Arrêt 3b : A quelques dizaines de mètres d'intervalle, des bancs durs forment deux surfaces structurales que le ruisseau a dégagées sur plus de 20 mètres. La deuxième surface (photo) accuse un léger pendage vers l'aval dans sa partie inférieure et offre un plan presque horizontal à l'amont. La progression est plus facile sur cette "autoroute".
Arrêt 4 : L'eau descend une petite chute formée par d'épais bancs calcaires au pendage marqué en direction de l'aval. Ils se prolongent à l'air libre sur la rive gauche (partie droite de la photo) et forment une corniche de quelques mètres.
Arrêt 5 : Quelques mètres en amont de l'arrêt 4, le ruisseau a entamé des niveaux marneux et dolomitiques très clairs disposées en strates minces. Au-dessus de cet affleurement se situent, masqués sous un rideau de lierre, les premiers gros bancs calcaires développés à l'arrêt 4. Leur pendage est légèrement relevé vers l'amont.
BILAN INTERMEDIAIRE
Si l'attribution des bancs de calcaires épais au Calcaire à entroques (arrêt 4) et celle des niveaux marneux clairs de l'arrêt 5 aux Couches blanches, ne fait pas de doute, il peut en être autrement pour les couches marno-calcaires (arrêts 1 à 4) de la partie aval. S'agit-il de Couches grises/blanches (t4b) ou de Couches à Cératites (t5b) ?
Divers arguments et observations permettent de trancher :
- des observations précises d'ordre sédimentologique et paléontologique
De gauche à droite et de haut en bas :
- détail de la stratification au sein des bancs carbonatés. Présence de galets (intraclastes) et d'ondulations témoignant d'une mise en place dans un milieu à forte énergie (tempestites).
- détail de surface de dalle vu à la loupe : des écailles losangiques millimétriques de poissons sont incluses dans le calcaire.
- Aspect de la surface de certains bancs : présence de pistes et terriers de fouisseurs, présence de terriers en U (Rhizocorallium).
- un marqueur typique de la série : une Cératite
Remarque : au Birzberg, les dalles à rides se situent au sommet des Calcaires à entroques
- des observations relatives à la géométrie des couches
dans la partie aval, leur disposition est quasi-parallèle au lit du ruisseau ( pente de 3,5% en moyenne), à l'arrêt 4 elles accusent un relèvement brusque vers l'amont.
A signaler : le forage au départ du parcours (parking/pont), implanté à l'altitude +202 m, a rencontré le toit des Couches blanches à +193 m, ce qui situe le contact Calcaire à Entroques-Calcaire à Cératites à l'altitude +200 m.
La nature des terrains de la partie aval ne fait plus aucun doute : la succession est la suivante t5b, t5a, t4b. Le parcours qui remonte le cours de la Bermelslach entre les arrêts 1 à 5 offre une série sédimentaire en ordre inverse. L'origine de cette "anomalie" est d'ordre tectonique comme va le prouver la suite du parcours.
DEUXIEME PARTIE : LE COURS SUPERIEUR DE LA LACH
Arrêt 6. Au premier plan (coin inférieur droit), l'affleurement précédent n°5. Au second plan et au soleil, le Calcaire à entroques forme une corniche perchée à quelques 4 mètres au-dessus de la Lach. Des blocs éboulés encombrent le lit du ruisseau. Le décalage entre la base du Calcaire à entroques de l'arrêt 5 et la base de la corniche (arrêt 6) est de l'ordre de 3 mètres : il correspond au rejet d'une faille. A son contact les couches sont légèrement rebroussées (crochon).
Arrêt 6 détail. Au niveau de la zone faillée, le compartiment soulevé offre un aspect particulier. Les Couches blanches de la base (niveaux rubanés et silicifiés visibles) et le Calcaire à entroques supérieur présentent des blocs broyés, descellés et partiellement altérés. Il s'agit d'une brèche de faille.
En progressant encore dans le lit du ruisseau, on découvre un modeste affleurement du sommet des Couches grises, puis au bout de 50 mètres supplémentaires, un petit passage marqué par des chutes d'eau.
Arrêt 7. A présent ce sont les Calcaires à entroques qui replongent dans le sous-sol. Le léger pendage des couches vers l'amont est souligné par les vasques que forme l'eau à la base de chaque ressaut.
La suite du parcours reproduit des paysages déjà vus en partie au départ de cette expédition.
Arrêt 8. Un ensemble de bancs marneux appartenant aux Couches à Cératites est visible sur la berge gauche. A l'arrière plan, un effondrement s'est produit. Le compartiment effondré comporte des bancs calcaires repérables dans la loupe d'arrachement et une couverture végétale (hêtres). Le ruisseau sape la base marneuse de la rive, les bancs calcaires en surplomb finissent par être fauchés. D'autre part, les eaux d'infiltration rencontrent des niveaux imperméables et les rendent plastiques. Ici, l'excès d'eau est évacué latéralement (stalactites de glace). Les bancs calcaires se mettent en mouvement sur les couches-savon que constituent les niveaux marneux. Des pans entiers avec leur couverture glissent dans le ruisseau. Ce dernier au fil des crues dégage l'obstacle ou alors modifie localement son cours.
Arrêt 9. A plusieurs reprises au cours de la progression, on aura remarqué dans les flancs du ruisseau, ces affleurements de matériel hétérogène constitué de débris de roches entremêlés. Il s'agit d'alluvions qui correspondent à des épisodes de dépôt sur certaines portions du cours. La brièveté du transport est soulignée par les fragments rocheux anguleux, les éléments de toutes tailles enrobés d'une matrice argileuse. A la faveur d'une crue, la sédimentation s'est opérée en vrac. Des lits de pierres plates agencées à la manière de dominos renversés témoignent parfois de l'existence d'un fond de ruisseau en période calme.
Plus haut encore, on retrouve des portions de dalles accompagnées de leurs vasques, parfois délicates à franchir à pied sec. Certaines de ces surfaces présentent des terriers en U de Rhizocorallium, plus rarement des rides de fond marin.
Au terme de ce parcours, le randonneur arrive à un "carrefour" à la hauteur d'un ruisseau confluent en rive droite. Un sentier parallèle à ce ruisseau monte vers la villa gallo-romaine du Grosswald. En rive gauche, un sentier mène sous le couvert d'un taillis au chemin forestier permettant le retour.
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