Enseignants et AESH ne demandent qu’à bien travailler ensemble. Mais les modalités de leur collaboration restent souvent peu claires et problématiques. Ce n’est pas la bonne volonté qui manque ; mais les uns et les autres sont sans doute trop laissés à eux-mêmes au moment de devoir travailler ensemble.
Les enseignants, qui ont plutôt l’habitude de travailler seuls, voient débarquer dans leur classe des AESH dont ils connaissent mal les missions ; les AESH, quant à eux, sont loin de savoir exactement ce qu’on attend d’eux. Une véritable collaboration suppose premièrement qu’on soit d’accord sur les objectifs que l’on partage et secondement que chacun ait une idée suffisamment claire de ses missions et de ses compétences et de celles de son partenaire.
Les AESH doivent être bien accueillis et bien intégrés dans l’école
Le Ministère, conscient des problèmes, a jugé nécessaire d’insister sur la nécessité d’un bon accueil de l’AESH dans l’école et d’en rappeler quelques aspects. C’est l’un des objets de la circulaire 2019-090 du 5 juin 2019.
La règle de base est que « Les AESH sont des membres à part entière de la communauté éducative au sein des écoles et établissements ». Ils doivent être reconnus et se sentir reconnus comme tels. Ils sont les bienvenus, parce qu’on a besoin d’eux.
Le Ministère préconise notamment que l’AESH soit présenté à l’équipe éducative et qu’avant le démarrage de l’accompagnement, le directeur de l’école ou le chef d’établissement organise une rencontre entre l’AESH, un représentant de l’équipe éducative, l’élève concerné et sa famille. La circulaire rappelle que les AESH participent aux entretiens utiles à l’accompagnement. Il s’agit en particulier des réunions des équipes éducatives et des ESS (Equipes de Suivi de la Scolarisation).
Ces dispositions devraient sans doute aller de soi mais s’il faut les prescrire, c’est un signe qu’on n’accorde pas toujours suffisamment d’attention à donner leur place aux AESH.
Les AESH attendent beaucoup des enseignants
Les AESH échangent volontiers sur Facebook, et ces échanges sont assez significatifs de leurs interrogations. Une question récurrente est bien de savoir ce qu’ils sont en droit d’attendre des enseignants et comment ils devraient être guidés par eux.
Verbatim :
Au moment de commencer sur mon premier poste, j’ai dit à l’instit. : « vous allez me guider? » Réponse : « …Euh… non. »
Je m’occupe d’un enfant autiste en maternelle. L’enseignante m’a reproché de ne pas lui faire faire assez d’activités. Elle me laisse gérer seule, l’enfant se lasse vite et j’ai beaucoup de mal à le faire se concentrer. Ma question : ai-je raison quand je dis que c’est à l’enseignante de prévoir ce qu’il va faire en classe ?
Avec un petit garçon autiste. L’enseignante ne me demandait rien, ne me reprochait rien. Mais, en gros, j’étais la maîtresse de l’enfant.
Je travaille en collège et la majorité des profs a tendance à oublier qu’il s’agit d’un élève à eux, ils pensent que c’est à nous de nous en occuper de A à Z et de prendre des initiatives.
En résumé les AESH attendent beaucoup des enseignants et sont souvent déçus. Trop souvent les enseignants leurs délèguent une partie du travail d’enseignement auprès des élèves en situation de handicap qui leur incombe.
Les enseignants ont une responsabilité pédagogique vis-à-vis des AESH
Administrativement, en ce qui concerne l’organisation de son travail, l’AESH est placé sous l’autorité du directeur de l’école ou du chef d’établissement. Pédagogiquement, il est sous la responsabilité de l’enseignant de l’élève auprès duquel il travaille.
Les AESH « se voient confier des missions d’aide aux élèves en situation de handicap. Ainsi, sous le contrôle des enseignants, ils ont vocation à favoriser l’autonomie de l’élève, sans se substituer à lui, sauf lorsque c’est nécessaire. » (Circulaire n° 2017-084 du 3-5-2017 relative aux missions et activités des AESH).
C’est logique, l’enseignant est garant du partenariat puisque l’élève est placé sous sa responsabilité pédagogique. C’est lui qui contrôle le travail de l’élève et qui peut voir avec l’AESH quelles aides lui apporter. Encore faut-il qu’il connaisse les missions de l’AESH…
Des outils pour une bonne collaboration entre enseignants et AESH
L’enseignant et l’AESH vont devoir se mettre d’accord sur les activités de ce dernier et les définir ensemble. Le projet d’accompagnement se construit autour des besoins éducatifs particuliers de l’élève. Il exige donc qu’on mette en regard d’une part les missions de l’AESH, telle qu’elles sont fixées par les textes, et d’autre part les besoins de l’élève. Comment l’AESH doit-il intervenir auprès de tel enfant, dans telle classe, dans telle ou telle situation ?
Le premier document auquel on se référera sera donc la liste des « activités des personnels chargés de l’accompagnement », qui figure dans la circulaire précitée du 3 mai 2017, et qui présente ces activités classées en trois grandes catégories :
- L’accompagnement des élèves dans les actes de la vie quotidienne
- L’accompagnement des élèves dans l’accès aux activités d’apprentissage (éducatives, culturelles, sportives, artistiques ou professionnelles)
- L’accompagnement des élèves dans les activités de la vie sociale et relationnelle.
Il s’agira ensuite de retenir parmi ces activités, celles qui correspondent aux besoins de l’élèves en envisageant les modalités d’accessibilité à l’environnement au sens large et aux apprentissages en particulier.
Le problème est alors d’identifier et évaluer ces besoins. Enseignant et AESH prennent appui sur leurs observations et sur la connaissance qu’ils ont de l’élève s’ils ont déjà travaillé avec lui. Mais ces besoins et la nature des interventions de l’AESH ont sans doute été mentionnés dans le PPS, fût-ce de façon plus ou moins sommaire.
Le PPS est donc l’autre document qu’on doit consulter. Les données du PPS sont complétées, on le sait, lors des réunions des ESS (Equipes de Suivi de la Scolarisation), dont les conclusions sont consignées dans le GEVASCO. Ces réunions des ESS sont un des lieux où précisément, on peut débattre du rôle et des activités des AESH. Elles sont souvent enrichissantes, mais arrivent parfois un peu tard.
C’est ainsi qu’on précisera le rôle de l’AESH auprès d’un l’élève. Le projet d’accompagnement, qui se met ainsi en place, ne sera jamais figé, il sera constamment adapté en fonction de l’évolution de la situation. Il pourra être enrichi aussi au fur et à mesure d’une meilleure connaissance des difficultés liées au handicap et des possibilités de les pallier. Les AESH pourront trouver aussi des documents utiles pour leur métier sur internet, notamment sur les sites des Inspections académiques (DSDEN).
Travailler ensemble demande aussi des temps d’échanges
Trop souvent, les enseignants ignorent les textes. Les connaître leur permet de préciser plus facilement aux AESH ce qu’ils ont à faire ou à ne pas faire. On délègue trop aux AESH des missions qui ne sont pas les leurs, comme par exemple la prise de note ou le rangement des affaires de l’élève. Aider l’élève, ce n’est pas faire le travail à sa place. Ni d’ailleurs à la place de l’enseignant. C’est ce dernier, par exemple, qui doit adapter le travail qu’il demande à l’élève en situation de handicap et non l‘AESH.
Concernant les temps d’échanges, indispensables, rappelons qu’un AESH exerce son travail d’accompagnant 36 semaines par an, tout en étant rémunéré sur la base de 41 semaines. Il y a donc un « reliquat » qui est d’environ 100 heures pour un AESH embauché à 50 %. Le Ministère considère qu’il s’agit là d’un temps utilisable pour des activités complémentaires : temps de formation personnelle et de préparation du travail, accompagnement des élèves lors de sorties, participation aux réunions, temps d’échanges avec les parents et les enseignants.
Rédigé à partir des propos recueillis auprès de Barbara Nivet, conseillère pédagogique ASH (17).