Un record de 22 minutes pour le tokamak WEST


Le tokamak WEST (Tungsten Environment in Steady-state Tokamak), situé à Cadarache en France, a récemment établi un record mondial en maintenant un plasma à haute température pendant 22 minutes. Cette performance marque une étape cruciale dans la recherche sur la fusion nucléaire, une technologie prometteuse pour produire une énergie propre, sûre et quasi illimitée.

La quête de la fusion nucléaire

La fusion nucléaire, processus qui alimente le Soleil et les étoiles, consiste à fusionner des noyaux atomiques légers, comme l’hydrogène, pour former des noyaux plus lourds, libérant ainsi une quantité colossale d’énergie. Contrairement à la fission nucléaire utilisée dans les centrales actuelles, la fusion ne produit pas de déchets radioactifs de longue durée de vie et ne présente pas de risque d’emballement.

Cependant, reproduire cette réaction sur Terre est un défi scientifique et technique de taille. Pour atteindre les conditions nécessaires à la fusion, il faut chauffer un plasma (un gaz ionisé) à des températures dépassant 100 millions de degrés Celsius et le confiner suffisamment longtemps pour que les noyaux fusionnent. C’est là qu’interviennent les tokamaks, des dispositifs en forme de tore qui utilisent des champs magnétiques puissants pour confiner le plasma.

WEST : un tokamak unique en son genre


WEST, anciennement connu sous le nom de Tore Supra, a été transformé en 2016 pour devenir un banc d’essai dédié à l’étude des matériaux et des technologies nécessaires pour les futurs réacteurs à fusion, notamment ITER, le projet international de tokamak en construction à Cadarache. WEST se distingue par son utilisation de composants en tungstène, un matériau résistant à la chaleur et à l’érosion, essentiel pour supporter les conditions extrêmes d’un réacteur de fusion.

Un record de 22 minutes : une prouesse technique

Le 22 décembre 2023, l’équipe de WEST a réussi à maintenir un plasma à une température de 50 millions de degrés Celsius pendant 22 minutes. Cette performance a été rendue possible grâce à plusieurs innovations :

1. Le divertor en tungstène

Ce composant, qui évacue la chaleur et les impuretés du plasma, a démontré une résistance exceptionnelle, permettant une durée de fonctionnement prolongée.
2. Le contrôle précis du plasma
Les scientifiques ont utilisé des systèmes de contrôle avancés pour stabiliser le plasma et éviter les instabilités qui pourraient interrompre la réaction.
3. Le refroidissement cryogénique
Des aimants supraconducteurs, refroidis à des températures proches du zéro absolu, ont permis de générer des champs magnétiques puissants et stables.

Implications pour l’avenir de la fusion

Ce record est une étape majeure vers la réalisation de la fusion nucléaire comme source d’énergie viable. Il démontre que les matériaux et les technologies développés pour WEST sont capables de supporter les conditions extrêmes d’un réacteur de fusion pendant des durées prolongées. Ces résultats sont particulièrement pertinents pour ITER, qui vise à produire un plasma pendant au moins 400 secondes (environ 6,5 minutes) et à générer plus d’énergie qu’il n’en consomme.

En outre, cette avancée renforce la position de la France et de l’Europe comme leaders dans la recherche sur la fusion. Elle ouvre également la voie à des projets futurs, comme DEMO, le successeur d’ITER, qui devrait être le premier réacteur de fusion à produire de l’électricité de manière continue.

Défis restants

Malgré ce succès, des défis subsistent. La fusion nucléaire nécessite encore des progrès significatifs en matière d’efficacité énergétique, de durabilité des matériaux et de réduction des coûts. Par ailleurs, la gestion des plasmas à très haute température et la maîtrise des réactions de fusion à grande échelle restent des domaines de recherche actifs.

Le record de 22 minutes du tokamak WEST est une preuve tangible que la fusion nucléaire n’est plus un rêve lointain, mais une réalité en devenir. Cette réussite illustre le potentiel de la fusion pour révolutionner notre système énergétique et contribuer à la lutte contre le changement climatique. Alors que la communauté scientifique continue de repousser les limites de la technologie, l’espoir d’une énergie propre et abondante se rapproche chaque jour un peu plus.

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