CIRCONSCRIPTION DE TOUL

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Pratiques de classes

les punitions à l’école

Problème posé :

Comment gérer la question des punitions en classe ?

La gestion de la discipline est un sujet qui préoccupe fréquemment les maîtres mais également les parents.

Pour asseoir son autorité, le maître peut être conduit à distribuer des punitions.

L’autorité du maître ne se mesure cependant pas à la quantité de punitions qu’il distribue...

Nous verrons qu’il nous semble tout à fait possible d’exercer une autorité efficace et mesurée sans avoir à recourir par exemple à la punition écrite.

Dans certaines classes, on observe une comptabilité volontiers fastidieuse et complexe : les fautes sont comptées, relevées ; au-delà d’une certaine quantité et après remontrance, des punitions sont distribuées.

L’élève qui doit effectuer ce travail supplémentaire, parfois le faire signer, est soumis ensuite à un contrôle dispendieux en énergie, suivi d’une éventuelle réprimande supplémentaire, de soupçons, d’inflation de lignes, de conflits, de tensions diverses.

Nous avons tous le souvenir de ces punitions partagées entre copains, parfois écrites par un grand frère ou de la main d’un adulte complaisant... Souvenir également des punitions données par le maître et doublées à la maison ou suivies parfois de châtiments corporels.

Certains élèves et certains maîtres entretiennent une relation ambiguë avec la punition où l’on se demande souvent si l’élève ne cherche pas sciemment à se faire punir pour entrer en relation duelle avec l’adulte dans une proximité qui peut devenir même une promiscuité.

La position des parents co-éducateurs légitimes n’est pas toujours claire : on veut bien que le maître soit sévère mais pour les autres… Le parent " convoqué " peut y voir une humiliation, se sentir coupable… "je n’élève pas bien mon enfant" et la littérature ne s’est pas privée de souligner les défaillances de la famille.

La punition entraîne pour le maître des débats internes : comment exercer son autorité sans en abuser ? Comment savoir être ferme sans devenir injuste ? Comment faire exécuter une sanction pour qu’elle soit rédemptrice, éducative et exemplaire puisque cette punition sera au moins connue du groupe classe ?

On connaît le maître qui lève la punition, celui qui la double... Celui qui l’oublie plus ou moins intentionnellement. On sait également qu’au sein des équipes de maîtres les choix, les interprétations, l’exercice de l’autorité peuvent s’exprimer dans des registres qui peuvent parfois être assez larges.

Dans de nombreuses écoles, surtout lorsqu’elles sont importantes, l’exercice de l’autorité et la gestion de ces sanctions sont confiés au directeur.

N’oublions pas symétriquement à cela l’existence de véritables petits tribunaux populaires d’enfants chargés de juger leurs camarades, de voter une punition et dans certains cas de s’assurer de son exécution... Si ce type d’excès reste rare, la mise en place des débats réglés, peut parfois donner lieu à des déballages publics qui posent problème.

C’’est une affaire d’éthique, mais c’est aussi une affaire tout à fait cadrée réglementairement.

C’est pour l’essentiel la circulaire du 6 juin 1991 qui définit nationalement le cadre dans lequel peut s’exercer la gestion de la discipline à l’école.

Dans chaque département, un règlement type départemental pose le cadre. Dans chaque école primaire (élémentaire et maternelle) le premier conseil d’école vote le règlement intérieur de l’école. Ce règlement doit être conforme avec les textes qui l’encadrent. En tout état de cause, si des sanctions ou punitions sont mise en oeuvre dans l’école, il conviendrait qu’elles soient prévues dans le règlement.

(exemples : http://www.ac-grenoble.fr/ecoles/bourgoin2/IMG/pdf_reglement_2010.pdf ou http://ec-21-milton.scola.ac-paris.fr/data/reglement%20interieur.pdf

Arrêtons-nous un instant sur ce qui concerne l’ école maternelle.

L’école maternelle est souvent le premier lieu de la socialisation de l’enfant et la nécessité d’y favoriser son épanouissement prime sur le reste : c’est ce qui justifie l’interdiction de la mise en oeuvre de toute sanction à ce niveau.

Cela n’interdit pas d’isoler de manière très courte un élève à la condition bien entendue qu’il ne soit jamais laissé sans surveillance.

La circulaire de 1991 souligne de manière tout à fait explicite la possibilité pour le maître de réprimander les élèves qui auraient manqué au respect du règlement intérieur de l’école et " en particulier, toute atteinte à l’intégrité physique ou morale des autres élèves ou des maîtres peuvent donner lieu à des réprimandes qui seront, le cas échéant, portées à la connaissance des familles. " La législation a été modifiée récemment mais dès 1991 il était déjà souligné : " les élèves, comme leur famille, doivent s’interdire tout comportement, geste aux paroles qui porteraient atteinte à la fonction ou à la personne du maître et au respect dû à leurs camarades ou familles de ceux-ci. "

Il va sans dire que cette circulaire rappelle l’interdiction absolue de tout châtiment corporel.

On peut à l’école élémentaire comme à l’école maternelle isoler un élève. Cet isolement ne peut se faire sans surveillance. Cela veut dire qu’il n’est pas possible d’envoyer l’élève qui se tient mal seul dans le couloir.

Dans certains cas, après accord on peut ponctuellement faire conduire un élève dans une autre classe, avec un travail…

Il est autorisé de priver un élève de récréation mais seulement partiellement.

On aura beau chercher, on ne trouvera nulle part à la citation des punitions écrites et encore moins la possibilité de retenir un élève après la classe ou de le faire revenir comme on pourrait l’envisager dans le secondaire. Sur le fait de retenir un élève après la classe, même quelques minutes, il faut souligner que le maître engage sa responsabilité civile et cela peut bien entendu avoir des conséquences extrêmement graves en cas d’accident ou de plainte de la famille.

Il n’existe pas de conseil de discipline à l’école primaire. Dans certains cas à l’école maternelle lorsque le comportement d’un jeune enfant perturbe dit la circulaire ; "gravement et de façon durable le fonctionnement de la classe et traduit une évidente inadaptation milieu scolaire il est possible de déscolariser l’enfant". On dira qu’il ne s’agit pas ici d’un problème purement relatif au respect des règles mais plutôt un problème d’ordre psychologique est comportemental qui requiert la mise en place d’une thérapie concertée et contrôlée médicalement. Chez les plus grands ce sont des difficultés graves affectant le comportement de l’élève qui peuvent conduire l’équipe éducative à se réunir puis si nécessaire, le directeur après avis du conseil d’école pourra proposer à l’ inspecteur de l’éducation nationale non pas un renvoi de l’élève mais une affectation dans une autre école.

La famille doit d’ailleurs pouvoir faire appel d’une telle décision devant inspecteur d’académie. Ce type d’approche reste très rare car le déplacement d’un élève dans un autre établissement risque de l’étiqueter auprès de la nouvelle école ; l’équipe qui reçoit cet élève en difficulté risque de ne pas s’investir positivement dans un tel projet et l’on voit parfois des écoles procéder à une sorte de marchandage, tentées par l’échange d’élèves difficiles...

Dans tous les cas, au-delà du cadre réglementaire national, c’est le règlement type départemental qui peut apporter des précisions, et bien entendu le règlement intérieur de l’école doit définir les règles du jeu. Ce règlement intérieur de l’école, c’est la Loi, le document de référence sur lequel les maîtres doivent pouvoir s’appuyer, prenant à témoin les élèves, les incitant à le relire à chaque fois que nécessaire. Le règlement est voté chaque année en Conseil d’Ecole.

Des choix collectifs doivent être faits. C’est en particulier tout à fait important pour tout ce qui concerne la circulation dans l’école et les temps de récréation. On doit savoir de manière explicite ce qui est autorisé et interdit, ce qui donne lieu à punition, isolement, quels objets peuvent être confisqués, pour quelle durée...

Prévenir

Au sein de la classe, le maître doit savoir témoigner de son exigence mais savoir surtout se montrer attentif, diagnostiquer très tôt les symptômes d’un risque de dérives comportementales, les transformer, les déjouer pour éviter justement que l’élève ne se mette en faute. Le maître prévient, il signale... Mais lorsqu’il dit quelque chose il le fait. Il ne doit donc pas céder à l’improvisation mais avoir pensé à l’avance ses modalités d’intervention.

Un exemple concret : les élèves viennent de s’installer en classe après un retour de récréation. Certains enfants sont prêts les premiers et montrent déjà qu’ils sont attentifs. Le maître va commencer par valoriser cette bonne attitude en félicitant les élèves qui sont prêts les premiers. Il va ensuite montrer qu’il souhaite introduire une activité, donner une consigne. Il a vu que quelques élèves n’étaient peut-être pas prêts encore. Les premières remarques qu’il va adresser ne seront pas nominatives. Il dira par exemple : " je vais expliquer ce que nous allons faire, mais tout le monde n’est pas encore tout à fait prêt... À présent c’est mieux, mais de personnes ne sont pas encore prêtes, c’est bien, nous allons pouvoir commencer... " Il faut de la patience mais elle est vite récompensée surtout si elle est accompagnée d’une posture ferme et tranquille, d’un positionnement clair, franc du maître qui est capable de regarder les élèves dans les yeux et de parler calmement.
Très observateur, vigilant, le maître privilégie l’activité et il anticipe pour éviter que les élèves ne se mettent en faute.
Selon sa personnalité, il lui sera possible ensuite de réguler par l’humour, en feignant la colère, en prenant le contre-pied de certains fonctionnements pourtant répandus.

Quelques idées :
- une leçon non sue : analyser les causes. Elles tiennent parfois à l’enfant, parfois à sa vie familiale. Il faut formaliser avec les élèves le moment où l’on apprend sa leçon et comment on peut l’apprendre en s’entraînant en classe au début. Si l’élève ne peut apprendre chez lui il faut trouver une stratégie : l’inscrire à l’étude, à la bibliothèque municipale, auprès d’une association d’aide aux devoirs… Si la leçon n’est pas sue on demandera une première mémorisation partielle en classe pour s’assurer qu’elle est possible puis on encouragera l’élève à poursuivre. Pour certains élèves, un " contrat " peut être mis en place où l’élève sait qu’il sera interrogé rapidement chaque matin.Un tutorat d’entraide peut être mis en œuvre…

- Un travail non fait : s’entretenir avec l’élève pour connaître les causes. Elles peuvent être liées au sens du travail, à une consigne mal comprise, une perturbation externe. Ici aussi, prévoir un temps dans la classe, lors par exemple d’un travail individualisé pour reprendre ou achever un travail.

- Éviter d’arracher la page brouillonne d’un cahier ou d’y inscrire une formule lapidaire. En revanche, on peut demander l’autorisation à l’élève d’enlever une page sale ou brouillonne pour donner la chance de la reprendre.

- Les problèmes de prise de parole : on peut s’entraîner à faire distribuer la parole par un élève, faire passer l’équivalent d’un bâton de parole qui peut être un objet déterminé par la classe, pourquoi pas un micro factice. Si un élève ne sait pas se contenir, on peut limiter ses droits à la prise de parole pendant un temps mesuré ou lui demander (cycle 3) de préparer un discours de cinq minutes pour le lendemain (qui sera minuté). Il peut être intéressant pour le maître de mesurer le temps qu’il prend pour parler lui dans la classe et celui qu’il donne à ses élèves...

- Les bavardages : peuvent être souvent traités avec humour. La construction du plan de classe (choix du voisin) aide souvent à trouver rapidement une solution. Le bavard peut ponctuellement être isolé à une table de travail en retrait.

- La propreté et les rangements : peuvent se faire par réparation des dégâts mais bien entendu ce n’est pas une punition que de faire ramasser par " le puni " les papiers de la cour car ce n’est pas lui le coupable… mais l’ensemble des élèves qu’on peut mobiliser pour faire cela en fin de récréation. Ramasser les papiers ne doit pas être une punition mais l’exercice d’une responsabilité.

- Le piquet : il doit être très ponctuel et limité (quelques minutes dans la cour) et toujours sous surveillance.
- La copie : c’est un très bon exercice à valoriser, certainement pas une corvée, alors une punition ou une récompense ?!

- L’interdiction de travailler : à utiliser ponctuellement pour l’élève qui se tient mal et n’écoute pas. "Ferme tes cahiers et tes livres. Croise les bras ! je t’interdis d’apprendre et d’écouter ce que nous faisons maintenant car c’est une leçon très importante " Ce contre-pied marche très bien en cycle 3. Du coup, l’élève est en général très attentif !

- La punition collective : idéale pour souder une classe contre l’adulte !

- La punition écrite : les excuses écrites sont souvent pertinentes ou la demande d’explication circonstanciée de ce qui s’est passé (par écrit). Tout devoir supplémentaire écrit doit être symbolique pour gagner en efficacité : suffisamment court, éventuellement signé de l’élève, d’un adulte. Beaucoup de maîtres jettent la punition à la poubelle sous les yeux de l’enfant. Quel mépris de l’effort ! Il faut au contraire conserver les punitions dans un classeur tout en proposant à l’élève qui a su modifier son comportement de les faire disparaître en fin de période. " On a tous pu faire une bêtise dans sa vie, si l’élève a su modifier son comportement et devenir sérieux, j’oublie et je ne vois que les progrès. Je ne veux même plus savoir les bêtises d’avant ". Cette méthode a bien marché en zone difficile. Il faut montrer à l’élève qu’il peut agir sur son destin mais qu’il n’est pas marqué à vie, qu’on fait confiance à ses possibilités d’avancer.

- La privation de sortie : à utiliser avec mesure car on va souvent punir le collègue qui devra accueillir l’enfant...mais si celui-ci manque de maîtrise, cela peut ponctuellement être efficace.
- La limitation des droits : à la condition de ne pas s’imposer une comptabilité complexe, un élève qui a eu des problèmes de comportement peut voir ponctuellement la limitation de certains de ses droits (choisir une activité, se déplacer, effectuer une présentation…)

- La valorisation : sanctionner c’est aussi féliciter et encourager. Il ne s’agit toutefois pas d’entretenir des compétitions ou d’introduire une " marchandisation ". Dans certaines classes on " rétribue " la bonne attitude. C’est ambigu même avec des images.

- Éviter les gestions complexes : la punition doit être exceptionnelle et sa gestion doit concerner peu d’élèves, être rapide et discrète. C’est souvent en perdant du temps pour contrôler les punitions des uns que les autres se dissipent. Une fiche doit aider le maître à ne pas oublier sinon il perd en crédibilité.

- La fiche d’auto évaluation du comportement : Elle permet de lister quatre à cinq points que l’élève évalue lui-même contrôlé ensuite par le maître. Mais là aussi ce doit être rapide.

- Se donner un objectif : pour la classe (apprendre à se déplacer en silence…) ou pour l’enfant qui peut avoir un petit " mémo " sur son bureau.

- Le sens de la justice : tenir ce que l’on dit, dire peu pour pouvoir le tenir, ne pas donner plus que ne pourrait faire l’élève…veiller aux équilibres.

- Ne pas " isoler " sans surveillance : pour certains élèves très énervés parfois, un " espace de décompression " peut être inventé pour eux, une table en fond de classe où l’élève peut s’isoler de lui-même pour retrouver son calme avant de rejoindre le groupe.

- S’appuyer sur le règlement intérieur, le faire lire ou relire pour montrer que ce n’est pas l’humeur du maître qui décide si l’élève est sorti ou non de la règle mais un texte écrit par la collectivité qu’il a signé et que ses parents ont signé.

- Communiquer et rencontrer : les parents de l’élève, l’élève avec plusieurs maîtres du conseil et le directeur.

- Il faut oser évoquer ces questions en équipe sans focaliser dessus, sans culpabiliser…une équipe soudée, ferme et équilibrée aide à avancer. Il faut évoquer les problèmes de gestion de groupe et les analyser.

- Structurer sa classe et mettre ses élèves en activité : une classe bien rangée, bien aménagée, où l’espace favorise la communication ; une classe où le maître favorisera l’entrée dans l’écrit et l’activité de tous sera une classe souvent beaucoup plus aisée à gérer. La vraie régulation vient de l’activité, de son intérêt propre et de la valorisation constante de l’effort et du travail bien fait.

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